(Kaboul) Les services de sécurité talibans bloquaient mardi l’accès à un hôtel de Kaboul très fréquenté par les hommes d’affaires chinois, au lendemain d’une attaque revendiquée par le groupe djihadiste État islamique et qualifiée d’« abominable » par Pékin.

« Cette attaque terroriste est abominable et la Chine est profondément choquée », a déclaré mardi Wang Wenbin, porte-parole du ministère des Affaires étrangères, lors d’un point de presse régulier. « Nous nous opposons fermement à toute forme de terrorisme ».

Lundi après-midi des assaillants armés ont attaqué cet établissement, l’hôtel Longan, situé dans l’une des principales zones commerciales de la capitale afghane. Des explosions et des échanges de rafales de coups de feu ont été entendus par plusieurs témoins.

« Selon nos informations, cinq citoyens chinois ont été blessés dans l’attaque terroriste, et plusieurs militaires et policiers afghans ont également été tués », a précisé le porte-parole chinois. Le ministère a donné pour consigne aux ressortissants chinois d’évacuer l’Afghanistan au plus vite, a-t-il rappelé.

Lundi soir, le porte-parole des talibans Zabihullah Mujahid avait annoncé « la mort de trois assaillants » ainsi que deux étrangers blessés en tentant de s’échapper. « D’autres blessés ont été signalés aujourd’hui », a-t-il ajouté mardi sans plus de précision. Une vidéo a montré un homme sautant par la fenêtre de plusieurs étages.

L’ONG Emergency, qui gère un hôpital de la capitale où ont été transportées des victimes, avait indiqué de son côté lundi avoir reçu « 21 blessés » et que « trois parmi eux étaient déjà morts » à leur arrivée, sans préciser s’il s’agissait des assaillants.

A Kaboul mardi matin, l’accès à l’hôtel Longan, un établissement d’une dizaine d’étages, était interdit aux journalistes qui n’avaient également pas le droit de parler aux habitants. De nombreux talibans armés s’assuraient que la consigne était bien respectée. Des rubans de signalisation ainsi qu’un véhicule blindé barraient la rue de l’entrée du bâtiment.

L’attentat a été revendiqué par le groupe État islamique. Dans un communiqué, l’EI a expliqué que deux de ses membres avaient attaqué l’hôtel en faisant « exploser deux engins cachés dans deux sacs », l’un ayant visé une fête pour des invités chinois et l’autre le hall de réception.

L’un des deux combattants a lancé des grenades sur des policiers talibans qui tentaient de les arrêter, tandis que l’autre a commencé à activer des engins explosifs qu’il avait collés sur les portes des chambres d’hôtel et à tirer sur les clients de l’établissement, selon l’EI.

« Forte explosion »

Les façades noircies de l’hôtel témoignaient mardi de la violence de l’incendie qui s’est déclaré suite à l’explosion et s’est propagé sur plusieurs étages, ont constaté des journalistes de l’AFP.  

De nombreuses fenêtres ont été soufflées par les flammes jusqu’aux avant-derniers niveaux.

« J’ai entendu le bruit d’une forte explosion et des tirs. Bien sûr tout le monde était effrayé », a expliqué sous couvert de l’anonymat un vendeur dans une rue adjacente.

« Je suis rentré dans le magasin et j’ai fermé le rideau comme nous l’ont demandé les talibans. Au bout d’une heure, on a pu sortir. J’ai vu une personne courir, je pense qu’elle était blessée », a poursuivi ce témoin qui est ensuite rentré directement chez lui.

Les talibans affirment avoir amélioré la sécurité dans leur pays depuis leur retour au pouvoir en août 2021, mais de nombreux attentats à la bombe ont été perpétrés ces derniers mois, généralement revendiqués par la section locale de l’EI, l’EI-K.

Des membres du personnel de l’ambassade chinoise se sont rendus lundi sur le lieu de l’attaque pour aider aux secours, a précisé le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères.

Les hommes d’affaires chinois ont afflué dans le pays depuis le retour au pouvoir des talibans en août 2021, à la recherche d’affaires à haut risque, mais potentiellement lucratives.  

Pékin n’a pas reconnu officiellement le gouvernement taliban, mais la Chine, qui partage 76 km de frontière avec l’Afghanistan, est l’un des rares pays à y avoir maintenu une présence diplomatique.

Elle craint depuis longtemps que l’Afghanistan ne devienne un point de chute pour la minorité musulmane ouïghoure en provenance de la très sensible région frontalière chinoise du Xinjiang.  

Les talibans ont promis que l’Afghanistan ne serait pas utilisé en tant que base par les militants ouïghours. En échange, Pékin leur a offert un soutien économique et des investissements pour la reconstruction de leur pays.