(Londres) Après plusieurs années d’« enfer » en Iran, deux Irano-Britanniques condamnés à la prison pour des accusations qu’ils ont toujours niées, ont atterri au Royaume-Uni à l’aube jeudi après leur libération la veille, épilogue heureux d’une longue et douloureuse saga.

« En parallèle » de la libération de Nazanin Zaghari-Ratcliffe, 43 ans, et d’Anoosheh Ashoori, 67 ans, Londres a aussi annoncé avoir soldé avec Téhéran une vieille dette de 394 millions de livres (470 millions d’euros), sans établir de lien entre les deux affaires.

Nazanin Zaghari-Ratcliffe et Anoosheh Ashoori ont atterri sur la base aérienne de la Royal Air Force de Brize Norton, dans le sud-ouest de l’Angleterre, à 1 h 08 locale après une escale à Oman.

Tous deux sont apparus détendus, souriant et saluant brièvement les caméras.

Des images les montrent dans le cockpit de leur avion en train de discuter avec les pilotes, avant de débarquer et de traverser le tarmac jusqu’au bâtiment principal de l’aéroport, où leurs familles les attendaient.

Des images postées sur le compte Instagram d’Elika, fille de M. Ashoori, montrent les retrouvailles des deux familles.

« Est-ce maman ? », demande Gabriella, sept ans, en voyant sa mère descendre de l’avion, avant de s’écrier « Maman ! », quand elle la reconnaît enfin.

Sur la vidéo, la fillette s’élance dans les bras de sa mère entrée dans un salon de la base. On entend des sanglots. « Est-ce que je sens bon ? », plaisante Mme Zaghari-Ratcliffe, « je n’ai pas pris de douche ces dernières 24 heures ».

C’est « un grand soulagement […] qu’elle revienne à la maison », avait déclaré à l’AFP son mari Richard Ratcliffe, qui se battait depuis des années pour sa libération et avait mené deux grèves de la faim pour attirer l’attention sur son sort.

« Nous pouvons recommencer à être une famille normale », avait-il ajouté devant son domicile londonien, leur fille à ses côtés.  

« Six ans d’enfer »

Le cas de Nazanin Zaghari-Ratcliffe avait vivement ému au Royaume-Uni.

Cette employée de la Fondation Thomson Reuters, bras philanthropique de l’agence de presse éponyme, avait été arrêtée en avril 2016 après avoir rendu visite à sa famille avec sa fille de 22 mois.  

Accusée de complot pour renverser la République islamique, elle avait été d’abord condamnée à cinq ans de prison.

Anoosheh Ashoori, ingénieur à la retraite, avait été arrêté en août 2017 alors qu’il rendait visite à sa mère et été condamné à 10 ans de prison pour espionnage en faveur d’Israël. Il a été libéré « en raison de son âge avancé et de sa condition physique », selon les autorités iraniennes.  

Sa famille a dit être « ravie » de le retrouver après 1672 jours de détention.

Alors que Téhéran retient plus d’une douzaine de détenteurs de passeports occidentaux, Londres a indiqué continuer à œuvrer au départ d’Iran de Morad Tahbaz, un Irano-Américain ayant également la nationalité britannique, condamné à 10 ans de prison pour « conspiration avec l’Amérique ». Selon la ministre britannique des Affaires étrangères Liz Truss, il a bénéficié mercredi d’une libération conditionnelle.

« Torture »

Nazanin Zaghari-Ratcliffe et Anoosheh Ashoori ont été libérés alors que les grandes puissances réunies à Vienne s’apprêtent à renouveler le Plan d’action global commun sur le programme nucléaire iranien, dit « JCPOA ».

L’accord permet un allègement des sanctions contre l’Iran en échange de la limitation de son programme nucléaire. Téhéran a déclaré mercredi qu’il restait « deux problèmes » avec les États-Unis pour rétablir l’accord.  

Mme Truss a confirmé que, avec l’aide diplomatique d’Oman, Londres et Téhéran avaient « parallèlement » résolu une dette de 394 millions de livres sterling (470 millions d’euros) remontant aux années 1970 et à l’époque du Shah d’Iran.

L’accord sur le paiement de la dette a été conclu « après des négociations très complexes et exhaustives », a déclaré M. Truss, et l’argent ne peut être utilisé que pour des biens humanitaires.  

Richard Ratcliffe avait affirmé à plusieurs reprises que sa femme était l’« otage » d’un sinistre jeu politique portant sur une vieille dette contractée par le Royaume-Uni dans le cadre d’un contrat d’armement.

Le Royaume-Uni a évité de dire que ces détentions étaient liées à cette dette.

Quatre ans après son arrestation, Mme Zaghari-Ratcliffe avait obtenu en mars 2020 une permission de sortie temporaire de prison en raison de la pandémie de COVID-19 et avait été placée en résidence surveillée chez ses parents.

Mais arrivée en bout de peine, elle avait de nouveau été condamnée fin avril 2021 à un an de prison pour avoir participé à un rassemblement devant l’ambassade d’Iran à Londres en 2009. En octobre, elle avait perdu son appel, faisant craindre à ses proches un retour en prison.