La République tchèque est aux prises avec une épidémie record de coqueluche qui cause des remous. Plus de 3000 cas ont été recensés depuis le mois de janvier, pour une population de 10,8 millions. Selon le site Radio Prague International, la bactérie aurait fait son premier mort lundi, un homme « âgé d’une soixantaine d’années ».

« Trois mille cas, c’est beaucoup parce qu’on sait que c’est la pointe de l’iceberg, ce chiffre ne correspond qu’aux personnes qui se sont fait tester. C’est donc une sous-représentation de ce qui se passe actuellement », confirme le DDonald Vinh, infectiologue et microbiologiste médical au Centre universitaire de santé McGill.

Les épidémies de coqueluche reviennent de manière cyclique tous les cinq ans environ. Mais la République tchèque n’avait pas connu une telle éclosion depuis les années 1960. « La maladie touche toutes les tranches d’âge », souligne l’Institut d’État de la santé publique sur son site web, tout en précisant que les adolescents sont les plus touchés, car leurs parents avaient « ignoré les recommandations de leur faire administrer un rappel du vaccin contre la coqueluche à l’âge de 10-11 ans ».

La vaccination contre la coqueluche est obligatoire en République tchèque, mais la protection donnée par le vaccin n’est pas valable à vie et nécessite des rappels. En outre, certaines personnes refusent de se faire vacciner. Selon le magazine tchèque Respekt, cité par France Culture, la République tchèque aurait un rapport compliqué avec la vaccination, attribuable notamment à l’influence des antivaccins pendant la crise de la COVID-19 et la crainte classique des effets secondaires.

Le média met aussi en cause le manque de suivi et de sensibilisation. « Dans le cas de la coqueluche et de la diphtérie, les gens n’ont aucune idée qu’ils doivent être revaccinés », affirme l’article.

Une forme de confusion semble en tout cas régner sur les protocoles à suivre cette fois-ci. Le service d’hygiène de la Ville de Prague a souhaité dans un premier temps renvoyer à la maison tous les élèves non vaccinés, espérant prévenir la contagion. Mais cette décision a été infirmée par le ministère de la Santé, selon qui le carnet de vaccination n’est pas une condition à la présence en classe.

« Les enfants vaccinés comme les non-vaccinés peuvent aller à l’école », a insisté Matyáš Fošum, chef du département de santé publique au ministère de la Santé, dans les colonnes du média tchèque Novinky.cz.

Le maire de Prague dans la tourmente

Autre polémique, entourant cette fois le maire de Prague, Bohuslav Svoboda, 80 ans. Ce dernier est dans la tourmente après avoir participé à plusieurs réunions la semaine dernière sans porter de masque… alors qu’il était atteint de la coqueluche. Ironie suprême : il est lui-même médecin ! Le service d’hygiène a déclaré que l’élu « aurait dû rester à la maison ».

PHOTO WIKIMEDIA COMMONS

Le maire de Prague, Bohuslav Svoboda

Selon le média tchèque CT24, relayé par France Culture, le Parti vert (opposition) aurait pour sa part décidé de porter plainte pour propagation de maladie contagieuse. Défense de l’accusé dans les colonnes du quotidien Denik N : « Je ne suis plus positif parce que je prends des antibiotiques depuis six jours… c’est ce qu’on m’a appris à l’école. J’espère que c’est bon… »

Matyáš Fošum, chef du département de santé publique, estime que la maladie a probablement atteint actuellement son pic épidémique, rapporte l’Agence France-Presse. « Les semaines à venir nous montreront où nous en sommes réellement », a-t-il ajouté.

À noter que la République tchèque n’est pas le seul pays de la région à être confronté à une épidémie de coqueluche. En Slovaquie, l’Autorité de santé publique a annoncé jeudi dernier avoir enregistré 123 cas de coqueluche à la fin du mois de février. En janvier, les médias serbes ont fait état de la mort d’au moins quatre enfants lors d’une épidémie à Belgrade, imputée par les médecins à la baisse du taux de vaccination.

La coqueluche est une maladie bactérienne contagieuse qui affecte les voies respiratoires et se transmet par voie aérienne. Les premiers symptômes peuvent s’apparenter à un simple rhume (nez qui coule, etc.), mais ils se transforment en une toux violente qui peut durer de cinq à sept semaines.

Si la coqueluche n’est pas la COVID-19 et qu’on peut s’en prémunir par un vaccin, elle peut être dangereuse, voire mortelle, ajoute le DVinh. « Le taux de mortalité est moins grand que la COVID-19 en termes d’échelle. Mais on ne veut pas retourner à un point où on doit réapprendre que c’est une infection qui peut être assez grave. On va voir que ça peut facilement surcharger un système de santé… »

Avec l’Agence France-Presse