(Moscou) Moscou a accusé samedi l’Azerbaïdjan d’avoir violé le cessez-le-feu avec l’Arménie signé après la guerre du Nagorny-Karabakh de 2020, en déployant des troupes dans la zone sous contrôle des forces russes de maintien de la paix.

Les incidents entre forces armées arméniennes et azerbaïdjanaises sont fréquents, mais c’est la première fois depuis la fin du conflit en novembre 2020 que Moscou accuse l’une des parties de violer la trêve dont Vladimir Poutine est le garant.

Ce regain de tension intervient aussi au moment où la Russie a lancé une offensive de grande ampleur contre l’Ukraine.

« Entre le 24 et 25 mars, les forces armées de l’Azerbaïdjan ont violé l’accord trilatéral des dirigeants de la Russie, de l’Azerbaïdjan et de l’Arménie […], entrant dans la zone sous responsabilité du contingent russe de maintien de la paix au Nagorny-Karabakh », a dénoncé le ministère russe de la Défense dans un communiqué.

À Bakou, le ministère azerbaïdjanais de la Défense a « regretté » la déclaration russe « qui ne reflète pas la vérité et n’adopte qu’un seul point de vue ».  

Il a assuré que « l’Azerbaïdjan n’a violé aucune clause » de l’accord de cessez-le-feu et aussi « demandé au ministère russe de la Défense d’assurer le retrait complet des troupes arméniennes et les unités armées illégales de ce territoire internationalement reconnu comme appartenant à l’Azerbaïdjan ».

Selon la Russie, les forces azerbaïdjanaises ont installé un poste d’observation et effectué « quatre frappes avec des drones de type Bayraktar » sur les forces du Karabakh près de la localité de Farukh.

« Le commandement russe du contingent de maintien de la paix prend les mesures en vue du règlement de la situation […] un appel à un retrait des troupes a été envoyé à la partie azerbaïdjanaise », a-t-il ajouté.  

Le ministère russe de la Défense n’a pas fait état dans son communiqué d’incidents armés samedi, contrairement aux autorités du Karabakh, selon lesquelles un drone azerbaïdjanais a fait trois morts et quinze blessés.

« Les forces armées azerbaïdjanaises sont toujours dans le village de Parukh », a déploré le ministère de la Défense du Karabkh.

La diplomatie russe a exprimé sa « profonde inquiétude ».

L’accord du 9 novembre 2020 signé par Vladimir Poutine et les dirigeants arménien, Nikol Pachinian, et azerbaïdjanais, Ilham Aliev, avait mis fin à un violent conflit de six semaines entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan pour le contrôle du Nagorny-Karabakh, territoire séparatiste proarménien.  

Les forces azerbaïdjanaises avaient alors fait d’importants gains territoriaux.

Vendredi, les autorités du Karabakh avaient fait état de deux soldats tués par les forces azerbaïdjanaises.

Catastrophe humanitaire

Le ministère arménien des Affaires étrangères a lui dénoncé samedi une « invasion » intervenue le 24 mars et marquée par des « tirs d’artillerie constants ».

Il a accusé aussi son voisin d’avoir privé le Karabakh de gaz, empêchant la population de se chauffer, et dénoncé une situation « au bord d’une catastrophe humanitaire ».

« Nous attendons du contingent russe de maintien de la paix au Nagorny-Karabakh qu’il prenne des mesures claires pour régler la situation et d’empêcher de nouvelles victimes de combats », a ajouté la diplomatie arménienne.

Le Kremlin a pour sa part indiqué samedi que MM. Pachinian et Poutine s’étaient entretenus à deux reprises, la veille et l’avant-veille, de la situation au Karabakh.

Peuplée majoritairement d’Arméniens, la région montagneuse du Nagorny-Karabakh, soutenue par Erevan, a fait sécession de l’Azerbaïdjan à la chute de l’URSS, entraînant une première guerre dans les années 1990 qui a causé la mort de 30 000 personnes et fait des centaines de milliers de réfugiés.

Un nouveau conflit a éclaté à l’automne 2020, faisant 6500 morts en six semaines.  

Il s’est soldé par une écrasante défaite de l’Arménie, contrainte de céder à l’Azerbaïdjan trois régions formant un glacis autour du Nagorny-Karabakh.