(Moscou) Un tribunal de Moscou a ordonné vendredi l’incarcération du frère cadet du principal opposant au Kremlin Alexeï Navalny, Oleg, une affaire qui s’inscrit dans un contexte de répression croissante dans la Russie de Vladimir Poutine.

Ce jugement a été rendu in absentia, les autorités ignorant où se trouve Oleg Navalny, qu’elles soupçonnent de s’être exilé à l’étranger comme bon nombre de militants de l’opposition.

En août 2021, Oleg Navalny, 38 ans, avait été condamné à un an de prison avec sursis pour violation des normes sanitaires liées au coronavirus, après avoir appelé les Russes à manifester pour la libération de son frère Alexeï, emprisonné depuis plus d’un an.

Oleg Navalny s'est peut-être exilé

Constatant qu’il n’avait pas pointé auprès des services pénitentiaires comme l’exigeait sa peine, le tribunal a donc décidé vendredi de « remplacer son sursis par un emprisonnement réel », a expliqué sur Twitter son avocat Nikos Paraskevov.

Selon les agences de presse russes, qui citent le président du tribunal vendredi, Oleg Navalny est allé à Chypre en septembre et les autorités ne disposent d’aucune information attestant qu’il soit rentré en Russie.

Un mandat d’arrêt avait été lancé le mois dernier contre Oleg Navalny après que les policiers ne l’eurent pas trouvé à son domicile. Son nom figurait depuis lors sur la liste des personnes recherchées diffusée sur le site internet du ministère de l’Intérieur.

La décision à l’encontre d’Oleg Navalny s’inscrit dans un contexte d’implacable répression contre toute forme de voix critique en Russie, avec une année 2021 particulièrement chargée de ce point de vue.

Celle-ci a notamment été marquée par l’incarcération d’Alexeï Navalny à son retour de convalescence en Allemagne à la suite d’un empoisonnement qu’il impute au Kremlin, le démantèlement de son mouvement, et la fermeture de l’ONG Mémorial, un pilier de la société civile.

Et 2022 n’est pas en reste : mardi, un nouveau procès s’est ouvert contre Alexeï Navalny, qui risque dans cette affaire jusqu’à 10 ans de prison supplémentaires.

Soutien indéfectible

Si l’opposant numéro un à Vladimir Poutine joue les premiers rôles depuis des années, son frère Oleg lui a toujours activement apporté son soutien dans l’ombre.

Il est lui-même déjà passé par la case prison. En 2014, Oleg et Alexeï ont en effet été condamnés dans une affaire de « fraude » ayant impliqué la société de cosmétiques française Yves Rocher et une entreprise dirigée par les deux frères Navalny.  

Si à l’époque l’aîné a été condamné à une peine avec sursis, Oleg s’est vu infliger une peine de trois ans et demi de prison ferme qu’il a purgée dans son intégralité, jusqu’à sa libération en juin 2018.  

Pendant son incarcération, Oleg s’est fait remarquer en réalisant de sombres tatouages sur l’univers carcéral et les répressions politiques, qu’il présentera au cours d’une exposition après sa libération et dessinera lui-même sur les corps de partisans de l’opposition.  

Alexeï Navalny a toujours accusé les autorités russes de prendre son frère en « otage » dans leur volonté d’entraver ses ambitions politiques.

Après l’emprisonnement d’Alexeï Navalny l’an dernier, ce fut à Oleg de lui apporter son soutien, ce qu’il faisait inlassablement, en appelant dans les médias et sur les réseaux sociaux à le remettre en liberté.

Oleg avait aussi juré de ne jamais « permettre » à ses enfants de vivre dans un « État policier » où « les gens sont envoyés en prison pour avoir défendu la vérité ».

Dans cette contestation en famille, la femme d’Alexeï Navalny, Ioulia Navalnaïa, qui le soutient depuis la première heure et dénonce activement son emprisonnement, ainsi que leur fille, Daria, 21 ans, qui étudie aux États-Unis, occupent également une place importante.