(Kiev) L’Ukraine a annoncé jeudi la nationalisation de Motor Sich, gros producteur de moteurs pour avions et hélicoptères, au risque de déclencher des tensions avec Pékin, des Chinois contrôlant la majorité des parts de ce groupe.

« La décision a été prise de rendre Motor Sich au peuple ukrainien », a annoncé jeudi Oleksiy Danylov, secrétaire du Conseil de sécurité et de la défense nationale, à l’issue d’une réunion de cet organe. La procédure « aura lieu prochainement par la voie légale », a-t-il poursuivi, sans donner d’autres détails.  

PHOTO TIRÉE DU SITE D’ANTONOV

Des réacteurs Motor Sich propulsent le gros avion cargo Antonov 124.

Des groupes chinois dont le Beijing Skyrizon Aviation ont acquis ces dernières années 75 % des parts de Motor Sich basé à Zaporijia (le centre-est de l’Ukraine), selon l’agence Interfax-Ukraine citant une source gouvernementale.  

Pressions américaines

Cette opération a été très mal vue par les États-Unis, partenaire crucial de Kiev dans son conflit avec Moscou et qui cherchent à la faire annuler en y voyant, selon des experts, un moyen pour Pékin d’obtenir des capacités de fabrication pour son industrie aérospatiale et militaire.

Plusieurs hauts responsables américains avaient évoqué ce dossier avec Kiev plaçant l’Ukraine en situation délicate alors qu’elle cherche à développer sa coopération économique avec la Chine.  

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a imposé en janvier des sanctions pour trois ans contre Skyrizon et son patron Wang Jing, après quoi la diplomatie chinoise a envoyé une note à Kiev, selon Interfax-Ukraine.  

La décision de Kiev a été prise deux semaines après l’annonce de sanctions américaines contre Skyrizon et autres groupes chinois, dont le fabricant de téléphones Xiaomi.

Motor Sich fabrique plusieurs moteurs pour les avions ukrainiens et russes, mais a rompu ses liens avec Moscou après l’annexion par cette dernière de la Crimée en 2014, se retrouvant dans une situation économique difficile.

Les actions de Motor Sich sont par ailleurs saisies par la justice ukrainienne depuis avril 2018 sur requête des services de sécurité ukrainiens (SBU) qui enquêtent sur la vente de ses parts à des « entreprises étrangères » et soupçonnent une tentative de « détruire » le fabricant stratégique.

Des investisseurs chinois ont de leur côté lancé en décembre une procédure d’arbitrage international contre l’État ukrainien, lui réclamant 3,5 milliards de dollars de dommages et intérêts dans la vente Motor Sich.