(Paris) Un ancien proche collaborateur du président français Emmanuel Macron, Alexandre Benalla, a comparu lundi à Paris devant la justice, trois ans après la tempête politique que les révélations sur ses agissements avaient déclenchée en France.

L’affaire Benalla, une cascade de révélations mettant en lumière les agissements de cet homme au cœur du dispositif de sécurité du président français, a secoué la première partie du quinquennat d’Emmanuel Macron.

PHOTO THOMAS COEX, AGENCE FRANCE-PRESSE

Alexandre Benalla est arrivé au tribunal, passant devant un mur de caméras sans faire de déclaration. L’ancien conseiller à la sécurité du président Emmanuel Macron avait déclenché une crise politique lorsqu’il a été vu tabassant un manifestant lors d’une manifestation des gilets jaunes en mai 2018. Il subit à partir du lundi 13 septembre son procès à Paris pour une dizaine de chefs d’accusation, dont violences volontaires, port illégal d’un écusson de police et port d’arme.

Costume sombre et cravate à pois, masque chirurgical et lunettes rondes, l’ex-proche collaborateur d’Emmanuel Macron, aujourd’hui âgé de 30 ans et reconverti dans le privé, est arrivé au tribunal peu avant 13 h, passant devant un mur de caméras sans faire de déclaration.

Il doit s’expliquer sur un premier volet d’agissements qui lui sont reprochés : son action violente contre des manifestants alors qu’il ne faisait pas partie des forces de l’ordre, et l’utilisation de passeports diplomatiques et de service.

Le 1er mai 2018, présent dans le dispositif des forces de sécurité comme observateur, coiffé d’un casque des forces de l’ordre, cet inconnu du grand public était filmé en train de molester des personnes en marge d’une manifestation émaillée de violences en plein cœur de Paris.

PHOTO NAGUIB-MICHEL SIDHOM, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Cette photographie prise le 1er mai 2018 montre le chef de la sécurité de l’Élysée Alexandre Benalla (au centre), portant un casque de police avec visière, molestant un manifestant lors des manifestations du 1er mai à Paris. Il subit à partir du lundi 13 septembre son procès à Paris pour une dizaine de chefs d’accusation, dont violences volontaires, port illégal d’un écusson de police et port d’arme.

Le journal Le Monde révélait l’affaire au cœur de l’été 2018, précisant qu’il n’avait été sanctionné que d’une suspension de 15 jours et qu’il possédait toujours un bureau à l’Élysée.

Une « affaire d’État »

Très vite, l’opposition dénonçait avec virulence une « affaire d’État », le Parlement était paralysé et une enquête judiciaire ouverte. Les mois suivants avaient été rythmés par une cascade de révélations et par les auditions, jusqu’au sommet de l’État, des commissions d’enquête parlementaires.

Visé depuis par six enquêtes judiciaires, dont une classée sans suite, M. Benalla a été renvoyé devant la justice notamment pour des violences en réunion et pour avoir usurpé la fonction de policier.

Avec son coprévenu et ami Vincent Crase, ancien gendarme de 48 ans, ils doivent notamment s’expliquer sur leurs agissements, filmés, le jour de la fête du Travail 2018 contre un couple place de la Contrescarpe, en plein Paris, mais aussi sur des soupçons de violences au Jardin des plantes, deux heures plus tôt, concernant trois manifestants.

PHOTO ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Cette photographie prise le 1er mai 2018 montre le chef de la sécurité de l’Élysée Alexandre Benalla (au centre), portant un casque de police avec visière.

Après un résumé des investigations, le tribunal s’est penché sur le parcours de l’ex-adjoint au chef de cabinet de la présidence, depuis le baccalauréat jusqu’à l’Élysée, en passant par ses études de droit, le service d’ordre du Parti socialiste et la campagne du candidat Emmanuel Macron.

Juste avant son vingt-cinquième anniversaire, en août 2016, l’association En Marche (première dénomination du futur parti présidentiel La République En Marche) l’embauche comme « directeur de la sûreté et de la sécurité », raconte-t-il.

Au cours des trois semaines d’audience, il devra aussi répondre de l’utilisation de deux passeports diplomatiques après son limogeage de l’Élysée. Il est aussi soupçonné d’avoir obtenu un passeport de service en produisant un faux, ce qu’il conteste.

Il est enfin poursuivi pour port d’arme non autorisé, en avril 2017 à Poitiers, pendant la campagne présidentielle d’Emmanuel Macron.

« Cette photo, quand elle est sortie, la première chose que j’ai pensé c’est que c’était un montage », a-t-il dit à l’audience. « Ensuite je me suis un peu souvenu de cette soirée festive, on a eu cette petite saynète, c’était une arme tout à fait factice », s’est-il défendu. Pendant l’enquête, il avait évoqué un « pistolet à eau ».

La présidente du tribunal s’étonne de quelques « incohérences » : « Excusez-moi du terme, mais un rigolo qui joue avec un pistolet à eau » et qui est chargé de la sécurité d’un candidat à la présidentielle, « il y a comme un décalage ».

« Cette photo, elle n’est pas bonne », convient M. Benalla. « Le geste est idiot, ce qui est sûr, c’est que c’est une arme factice », martèle-t-il.

Le prévenu encourt jusqu’à sept ans de prison et 100 000 euros d’amende.