(Château de Brdo (Kranj)) Les ministres européens de la Défense doivent discuter jeudi en Slovénie de la création d’une force de réaction rapide, après que le retrait américain d’Afghanistan a suscité une prise de conscience sur la faible marge de manœuvre de l’UE.

Les appels se sont multipliés ces derniers jours pour que le bloc de 27 pays développe sa propre capacité militaire commune afin de répondre rapidement aux crises, après les scènes de chaos à l’aéroport de Kaboul qui ont suivi la prise du pouvoir par les talibans.

Les ministres européens doivent réexaminer une proposition - présentée pour la première fois en mai - visant à mettre sur pied une force de 5000 hommes dans le cadre d’une révision de la stratégie de défense de l’UE qui devrait être finalisée l’année prochaine.

Mais il y a de sérieux doutes sur la capacité des Européens à faire aboutir un tel projet, l’UE n’ayant jamais été en mesure d’utiliser un système de « groupements tactiques » mis en place en 2007, mais qui requiert l’unanimité des États membres pour être activé.  

« Il est clair que la nécessité d’une défense européenne plus importante n’a jamais été aussi évidente qu’aujourd’hui après les évènements en Afghanistan », a déclaré jeudi le chef de la politique étrangère de l’UE, Josep Borrell, au début de la réunion au château de Brdo (nord de la Slovénie). « Parfois, il se passe quelque chose qui crée une percée et je pense que les évènements survenus cet été en Afghanistan en font partie », a-t-il ajouté.

Interrogé sur la création d’une nouvelle force militaire européenne, M. Borrell a insisté sur le fait que « nous devons opter pour quelque chose de plus opérationnel », les groupements tactiques étant restés inutilisés.

Le ministre slovène de la Défense, Matej Tonin, dont le pays assure la présidence tournante de l’UE, a estimé qu’une force de réaction rapide pourrait compter entre « 5000 et 20 000 hommes ». Il a appelé à la mise en place d’un nouveau système qui permettrait d’envoyer des troupes de « pays volontaires » au nom de l’UE si une majorité d’États membres l’acceptaient, au lieu de l’unanimité requise pour les groupements tactiques.

La leçon de l’Afghanistan, c’est que « nous devons devenir plus autonomes en tant qu’Européens et être en mesure d’agir de manière plus indépendante », a estimé son homologue allemande, Annegret Kramp-Karrenbauer. Mais, a-t-elle souligné, « il est très important que nous n’agissions pas comme une alternative à l’OTAN et aux Américains ».

Le ministre letton Artis Pabriks a déclaré que le bloc devait montrer qu’il avait la « volonté politique » d’utiliser cette force. « Nous essayons de faire des plans énormes sur la défense commune de l’UE, mais les groupes de combat existent depuis une décennie. Les avons-nous déjà utilisés ? », a-t-il interrogé.

L’UE est divisée depuis des années sur le rôle qu’elle devrait jouer en matière de défense, notamment en raison des fortes réticences des pays de l’Est, très attachés au parapluie de l’OTAN et des Américains, face à Moscou.

Les discussions ont été relancées après la sortie du Royaume-Uni, fermement opposé à la perspective d’une armée européenne.