(Bruxelles) Un militaire d’extrême droite, probablement en possession d’armes à feu, restait toujours introuvable jeudi en Belgique, un cas de radicalisation au sein de l’armée qui suscite des interrogations sur un défaut de surveillance.

Jurgen Conings, 46 ans, soupçonné de vouloir s’en prendre à l’État belge et à un virologue connu, pourrait s’être retranché dans une réserve de 12 000 hectares de forêts et de landes, où il fait l’objet d’une vaste chasse à l’homme par des centaines de policiers et militaires depuis mercredi.

PHOTO JOHANNA GÉRON, REUTERS


Un blindé de l’armée belge arrivant à l’entrée du parc national Hoge Kempen, en Belgique, durant des recherches visant à capturer le Belge Jurgen Conings, un soldat qui a disparu après avoir menacé un virologue favorable aux vaccins anti-COVID-19.

Il est introuvable depuis la découverte mardi en fin d’après-midi de sa voiture en lisière de cette réserve, le parc national de la Haute-Campine, dans le nord néerlandophone, non loin de la frontière avec les Pays-Bas.

« Plus de 400 personnes sont en train de balayer ce territoire pour essayer de résoudre cette situation dangereuse », a affirmé le premier ministre Alexander De Croo, jeudi après-midi devant les députés.

Afin de renforcer les 250 policiers et 150 militaires belges sur place, les pays voisins ont été sollicités pour fournir des policiers. L’Allemagne « a approuvé une demande de soutien en personnes des autorités belges », et des policiers allemands « sont maintenant arrivés en Belgique », a indiqué en début de soirée à l’AFP un porte-parole du ministère de l’Intérieur fédéral, sans préciser de chiffre.

Le parc national se situe près de la frontière avec les Pays-Bas, où la police néerlandaise se dit « en alerte » et où des unités spéciales se tiennent prêtes à intervenir, a rapporté pour sa part l’agence de presse Belga.

Des lance-roquettes dans son 4X4

Jurgen Conings ne s’est plus manifesté après s’être rendu lundi sur la base militaire où il travaille, et où il est soupçonné d’avoir dérobé des armes.  

Mardi en fin d’après-midi son 4X4 a été retrouvé près du village de Niel-bij-As, en bordure d’une zone boisée, avec à l’intérieur quatre lance-roquettes antichars et des munitions.

Mais il est « probablement encore en possession d’un armement plus léger » et reste donc potentiellement dangereux, avait précisé le parquet fédéral mercredi.

Vétéran de l’Irak et de l’Afghanistan

Ce militaire aguerri, déjà parti en mission notamment au Kosovo, en Irak et en Afghanistan selon les médias flamands, semble déterminé à s’en prendre à des représentants de l’État belge et à des personnalités, d’après des écrits retrouvés par les enquêteurs.

Parmi ses cibles potentielles figure le virologue flamand Marc Van Ranst, expert parmi les plus en vue dans la crise sanitaire.

Devenu la bête noire des « antimasque » et autres opposants aux restrictions de rassemblements, ce scientifique de 55 ans est également coutumier des prises de position contre le racisme et la xénophobie et en découd régulièrement avec l’extrême droite flamande sur les réseaux sociaux.

Jurgen Conings compte, lui, parmi la « trentaine » de membres de l’armée belge surveillés par les services du renseignement militaire pour leurs « sympathies » avec l’extrême droite, selon des sources officielles.

Pour la même raison, il est également fiché par l’OCAM, l’organisme belge d’analyse de la menace terroriste, depuis trois mois, a précisé jeudi Alexander De Croo.  

« Propos racistes sur Facebook »

« Une information qui avait été transmise à la Défense », a déclaré le dirigeant libéral flamand, en appelant l’armée à « durcir absolument » ses « procédures et contrôles internes ».

« Appeler à la haine et à la violence c’est inacceptable, qu’il s’agisse de virologues, de scientifiques, d’adversaires politiques. C’est punissable par la loi », a aussi dit le premier ministre.

De son côté, la ministre de la Défense, Ludivine Dedonder, a admis au Parlement que M. Conings avait fait l’objet de sanctions de sa hiérarchie en 2020 après avoir « tenu des propos racistes » et « proféré des menaces » sur Facebook. Une plainte avait même été déposée par l’état-major, classée sans suite, selon elle.

« Force est de constater que ça n’a pas suffi » pour l’empêcher d’avoir accès à des armes, a déploré la ministre socialiste francophone.

« Il n’y a pas de place à la Défense pour des extrémistes ou des fascistes », a-t-elle lancé.

Pour faciliter les recherches, le parc de la Haute-Campine a été interdit au public depuis mercredi, et une portion de l’autoroute E314 fermée à la circulation à hauteur de Maasmechelen en direction de Genk.