(Paris) Emmanuel Macron a défendu mercredi, dans une interview au magazine Le Point, son choix d’un « lexique large et de tournures de phrases parfois exigeantes » face à des populistes dont il dénonce « une réduction du vocabulaire, les phrases courtes et des procédés rhétoriques parfois grossiers ».  

« Opposer à ce projet une langue de nuances et de justesse, c’est déjà résister », a ajouté le chef de l’État, qui émaille souvent ses discours de termes rares ou désuets tels qu’anomie, irénisme ou carabistouilles.

Ou encore « saxifrage », qu’il mentionne comme l’un de ses mots préférés, du nom d’une herbe vivace qui s’installe dans les fissures des rochers que célèbre notamment le poète René Char dans son poème « Pour un Prométhée saxifrage ».

Limpide de précision, mais parfois long

Il reconnaît en revanche, dans sa recherche de démonstrations de fond, une tendance à des discours trop longs.

Les Français apprécient la pensée agencée de manière ordonnée, transparente ; le raisonnement au fond ; la démonstration qui recherche l’adhésion rationnelle.

Emmanuel Macron

« Cela ne veut pas dire qu’il ne faut faire que des prises de parole d’une heure et demie-j’ai sans doute souvent été trop long, concède-t-il. Mais renoncer à la rhétorique, à la force des mots, non. »

Emmanuel Macron commente également la défiance envers les discours des politiques, qui pour lui « tient moins aux discours qu’au décalage entre les discours et les actes ». « C’est pourquoi une de mes obsessions est d’appliquer le projet pour lequel les Français m’ont élu », insiste-t-il.

« Je crois par ailleurs que c’est moins les discours en tant que tels qui créent la défiance que leur manipulation, le fait qu’ils soient tronqués, résumés en un bandeau en quelques caractères », poursuit-il, en une pique contre les chaînes d’info.

Un pays « engendré par sa langue »

Il décrit la France comme un pays « engendré par sa langue » en citant l’ordonnance de Villers-Cotterêts, promulguée dans le château éponyme, qui en 1539 a rendu obligatoire l’usage du français dans les documents officiels.

Emmanuel Macron veut faire restaurer ce château du XVIe siècle bâti par François Ier pour y installer une Cité internationale de la francophonie, un chantier budgété 100 millions d’euros dans le plan de relance post-Covid.

« Pour ceux qui dirigent le pays ou aspirent à le faire, “fréquenter” le français par les livres, les essais ou la littérature me semble important », conclut le président, qui explique avoir « toujours écrit » et travaillé tous ses discours « personnellement ».