Après trois mois de mobilisation, des milliers de « gilets jaunes » défilaient samedi dans plusieurs villes de France lors d'un acte 14 relativement calme à Paris, mais marqué de nouveau par des heurts à Toulouse et Bordeaux.

Le ministère de l'Intérieur a dénombré 41 500 manifestants en France dont 5000 à Paris, des chiffres en recul par rapport à la semaine précédente, mais régulièrement contestés par les « gilets jaunes ».

Dans la capitale, une foule compacte de plusieurs milliers de personnes est partie de la place de l'Étoile vers 12 h pour rallier plusieurs heures plus tard l'esplanade des Invalides, qui a été évacuée en fin d'après-midi, a constaté une journaliste de l'AFP.

Après de brefs face-à-face avec les forces de l'ordre, les « gilets jaunes » se sont dispersés, certains rejoignant les Champs-Élysées en début de soirée aux cris, devenus traditionnels, de « Macron démission ».

« C'est pas la fin, ce sera la fin quand Macron nous aura entendus. Qu'il nous aura rendu la démocratie », a déclaré à l'AFP Jérôme Rodrigues, devenu un symbole des violences policières depuis qu'il a perdu un oeil fin janvier place de la Bastille.

Selon la préfecture de police, 26 personnes ont été interpellées à Paris même si les tensions semblaient moindres que lors de l'acte 13. Un manifestant avait alors eu la main arrachée lors de heurts devant l'Assemblée nationale.  

La mobilisation parisienne a toutefois connu un bref moment de tension quand le cortège a croisé la route du philosophe Alain Finkielkraut, insulté par des manifestants aux cris de « sioniste de merde ». « Un déferlement de haine à l'état pur », a dénoncé dans un tweet le ministre de l'Intérieur Christophe Castaner.

Tensions

D'autres villes ont connu des tensions plus marquées en fin de manifestation, notamment Bordeaux, autre bastion de ce mouvement qui fragilise le gouvernement et l'a contraint à lancer un grand débat.

Le cortège de plusieurs milliers de personnes a emprunté les rues des quartiers cossus où des tags proclamaient notamment « mort aux riches ». Au bout de l'itinéraire, des violences ont éclaté : la police a répondu à coup de canons à eau et de gaz lacrymogène à des jets de projectiles, selon des journalistes de l'AFP.  La mobilisation a réuni 5000 personnes dans la ville, selon une source policière.

« Beaucoup de gens ne viennent pas ou plus parce qu'ils voient les images, ils ont peur », dit Virginie, 42 ans, conseillère dans la grande distribution.

À Toulouse, 4000 personnes selon une source policière clamaient leurs détermination derrière une banderole « Seule la mort nous arrêtera ». Les premières échauffourées ont commencé à 16 h 30 et se poursuivaient en fin d'après-midi. Huit personnes ont été interpellées, selon la préfecture.

À Rouen, quatre « gilets jaunes » ont été légèrement blessés par une voiture qui a tenté de fendre le cortège. Le conducteur, qui était avec sa femme et leur bébé, était bloqué par des manifestants, selon une source policière.

La manifestation nantaise, à laquelle ont pris part 1600 manifestants selon une source policière, a été émaillée d'incidents avec des jets de pavés, de bouteilles et de fusées, selon la préfecture.  

Tandis qu'à Lyon, plusieurs milliers de manifestants s'étaient rassemblés dans le centre, des « gilets jaunes » tentaient de bloquer le trafic sur l'autoroute A7 à la sortie sud de la ville, provoquant des difficultés de circulation en ce week-end de chassé-croisé.

Sur Twitter, le président de l'Assemblée nationale, Richard Ferrand a condamné le « saccage » de la permanence du député de la Sarthe Damien Pichereau, en marge de la manifestation des « gilets jaunes » au Mans.

« Destitution »

D'autres manifestations rassemblant d'une centaine à un millier de personnes se sont tenues à Pontivy, Caen, Grenoble, Strasbourg, Alençon, Rennes ou au Mans.

À Marseille, une dizaine de « gilets jaunes » ont entamé une marche pour le RIC (Référendum d'initiative citoyenne) à Marseille, qui doit les amener à Paris le 17 mars.

Mathieu à Lille, travailleur social de 31 ans, réclame « la destitution du gouvernement » : « je continuerai à manifester tant que ce gouvernement sera encore en place ». Plus d'un millier de personnes ont battu le pavé dans la capitale des Flandres.

Lancée le 17 novembre, cette contestation a moins les faveurs de l'opinion : pour la première fois, une majorité de Français (56 %) souhaitent que la mobilisation s'arrête, selon un sondage Elabe diffusé mercredi.  

Des appels ont été lancés à Paris notamment pour poursuivre la mobilisation dimanche par une manifestation « pacifique ».