(Londres) Le Brexit n’a pas eu lieu jeudi? Pas ma faute! s’est défendu en substance le premier ministre britannique Boris Johnson, rendant l’opposition travailliste responsable de son échec à le réaliser, en ouverture de la campagne électorale pour les législatives anticipées du 12 décembre.    

Arrivé au pouvoir en juillet en promettant que la sortie de l’Union européenne aurait lieu «coûte que coûte» le 31 octobre, le premier ministre avait juré qu’il préférait être «mort au fond d’un fossé» plutôt que demander un nouvel ajournement.

Mais il a dû entre temps ravaler sa fierté et demander aux Européens un report jusqu’au 31 janvier, son accord de divorce négocié avec Bruxelles n’ayant pas passé l’épreuve du Parlement.

«Aujourd’hui aurait dû être le jour où le Brexit était réalisé et où nous aurions enfin quitté l’UE», a relevé Boris Johnson dans un communiqué.  

S’il ne s’est finalement pas fait, ce n’est pas de sa faute, mais celle de Jeremy Corbyn, chef des travaillistes, principale formation de l’opposition, a assuré le dirigeant, qui craint à présent de perdre les voix des électeurs pro-Brexit pour promesse non tenue, malgré son avance dans les sondages.

«Malgré l’excellent nouvel accord que j’ai conclu avec l’UE, Jeremy Corbyn s’est opposé à ce que cela puisse arriver, préférant plus d’indécision, plus de report et plus d’incertitude pour les familles et les entreprises», a ajouté le chef de gouvernement conservateur.

Janvier «au plus tard»

AP

Boris Johnson a visité mercredi le Cambridge Clinical Research Facility.

«Si vous votez pour nous […] nous pourrons sortir (de l’UE) vraiment au plus tard d’ici janvier l’an prochain», a-t-il promis ultérieurement en visitant un hôpital, blouse blanche sur les épaules. Il a fait de la santé un des thèmes de prédilection de sa campagne pour ces législatives, les troisièmes en quatre ans.  

Pour sortir de l’impasse du Brexit, qui paralyse le Royaume-Uni depuis le référendum de juin 2016 qui l’a voté à 52%, le Parlement s’est résolu mardi à convoquer des législatives anticipées le 12 décembre.

Ces accusations d’entrave au Brexit ont été balayées par Jeremy Corbyn, qui a moqué le dirigeant conservateur dans son discours marquant le lancement de sa campagne à Londres. «Il a dit qu’il préférait être mort dans un fossé que de reporter […], mais il a échoué et son échec relève de sa seule responsabilité. On ne peut pas se fier à sa parole.»

«Vrai changement»

Le travailliste s’est engagé à résoudre le casse-tête du Brexit «en six mois» s’il accède au pouvoir, en négociant «immédiatement» un nouvel accord de divorce «raisonnable» avec Bruxelles, avant de le soumettre à un référendum qui proposerait aussi la possibilité de rester dans l’UE.

«Le gouvernement travailliste mettra à exécution ce que le peuple décidera», a promis M. Corbyn, refusant toujours de lever le voile sur sa propre préférence.  

AFP

Jeremy Corbyn prend un selfie avec la candidate travailliste Hannah O'Neil et des militants à Milton Keynes, mercredi, dans le sud de l'Angleterre.

Mais plutôt que d’insister longuement sur la sortie de l’UE dans son discours, Jeremy Corbyn s’est positionné en défenseur du peuple face aux «élites», après des années d’austérité conservatrice, abordant surtout des thèmes de politique intérieure comme la santé, la protection sociale ou l’éducation.  

Dans son viseur, les «fraudeurs fiscaux», les «propriétaires peu scrupuleux», les «mauvais patrons» et les «grands pollueurs». Il s’est engagé à éradiquer la pauvreté, rendre le logement abordable, supprimer les frais d’inscription universitaires, nationaliser les services publics ou initier une «révolution industrielle verte» pour lutter contre le réchauffement climatique.  

«Le vrai changement arrive», a-t-il assuré devant les militants, évoquant «une occasion unique de transformer» le Royaume-Uni.  

Le patronat britannique a récemment évalué à 196 milliards de livres (333 milliards $ CAN) le coût des nationalisations prévues par le Labour, qui l’a aussitôt accusé de propager une «fausse information».

Boris Johnson avait estimé mercredi que le programme des travaillistes engendrerait une «catastrophe économique», promettant lui-même d’investir «massivement» dans les services publics.

Alors que la campagne électorale démarre tambour battant, le parti libéral-démocrate, europhile, a présenté son slogan jeudi : «Arrêter le Brexit».