(Vienne) L’Autriche veut fermer un centre interreligieux controversé financé par l’Arabie saoudite et établi en 2012 à Vienne, jugeant sa présence incompatible avec les violations répétées des droits de la personne par Riyad.

Le centre «Roi Abdallah Ben Abdelaziz pour le dialogue interreligieux et interculturel» (KAICIID) n’a cessé depuis sa création de susciter des polémiques, ses opposants lui reprochant d’offrir une vitrine humanitaire au régime wahhabite au pouvoir en Arabie saoudite.

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Le roi Abdallah Ben Abdelaziz est décédé en 2015.

Cette institution avait toutefois bénéficié jusqu’à présent de la protection de l’ex-ministre des Affaires étrangères et ex-chancelier Sebastian Kurz, dont le parti conservateur ÖVP joue traditionnellement un rôle pivot en Autriche.

Mais le départ de M. Kurz à la suite d’une motion de censure fin mai a rebattu les cartes. Profitant de l’absence de coalition constituée au Parlement jusqu’aux législatives anticipées de septembre, les partis écologistes Jetzt, social-démocrate SPÖ et d’extrême droite FPÖ ont réuni mercredi une majorité de circonstance pour enjoindre au gouvernement intérimaire de fermer ce centre, conduisant l’ÖVP à les imiter.

Le ministère des Affaires étrangères a immédiatement indiqué qu’il veillerait à exécuter cette décision «sans nuire aux intérêts de l’Autriche à l’étranger, et dans le cadre des usages internationaux».

Financé par Riyad, le KAICIID, qui jouit du statut d’organisation intergouvernementale, est né d’un traité entre l’Arabie saoudite, l’Espagne et l’Autriche. Le Vatican y siège comme observateur. Son rôle est officiellement de favoriser le dialogue entre l’islam, le christianisme, le judaïsme, l’hindouisme et le bouddhisme.

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Sebastian Kurz

En janvier 2015, l’ancien chancelier social-démocrate Werner Faymann avait déjà indiqué vouloir désengager son pays du Centre, après la condamnation du blogueur saoudien Raïf Badawi à 1000 coups de fouet et 10 ans de prison. Il s’était cependant heurté à l’opposition de l’ÖVP.

Mercredi, le député Peter Pilz (Jetzt), à l’origine de la résolution du Parlement, a notamment évoqué le cas du jeune Saoudien Murtaja Qureiris, 18 ans, détenu depuis cinq ans pour «lèse-majesté» et condamné à mort en août dernier.

Le KAICIID, qui regroupe des représentants des grandes religions et est soutenu par le Vatican, a régulièrement souligné n’avoir «pas pour mission de commenter les décisions de justice d’États souverains».