«Je ne veux plus me mentir»: faute d'obtenir des avancées suffisantes en matière d'environnement, le populaire ministre français de la Transition écologique Nicolas Hulot a jeté l'éponge mardi, un coup dur pour le président Macron qu'il n'avait pas prévenu de sa démission.

«Je prends la décision de quitter le gouvernement», a déclaré Nicolas Hulot, lors d'une interview en direct sur la radio France Inter, après avoir confié qu'il se sentait «tout seul à la manoeuvre» sur les enjeux environnementaux au sein de l'exécutif.

«Je vais prendre la décision la plus difficile de ma vie, je ne veux plus me mentir, je ne veux pas donner l'illusion que ma présence au gouvernement signifie qu'on est à la hauteur sur ces enjeux-là», a ajouté l'ex-animateur de l'émission à succès Ushuaïa.

«Nous faisons des petits pas, et la France en fait beaucoup plus que d'autres pays, mais est-ce que les petits pas suffisent... la réponse, elle est non», a-t-il considéré, la gorge nouée, ajoutant en avoir «terminé» avec la politique.

Il s'agit d'un coup dur pour le président Emmanuel Macron qui avait réussi à convaincre le populaire M. Hulot d'entrer au gouvernement en mai 2017.

Cette démission intervient avant une rentrée qui s'annonce difficile pour le chef de l'État. En baisse dans les sondages et secoué cet été par l'affaire Benalla, du nom de son ancien collaborateur accusé de violences lors d'une manifestation, M. Macron doit composer avec une croissance économique moindre qu'espéré et peine à convaincre ses partenaires de l'UE de renforcer l'intégration européenne.

La démission surprise de M. Hulot, 63 ans, est d'autant plus douloureuse pour le président que l'ex-journaliste ne l'avait prévenu ni lui, ni le Premier ministre Édouard Philippe.

«Je sais que ce n'est pas très protocolaire», a-t-il admis, confiant sa crainte qu'ils cherchent «une fois encore» à le «dissuader» de démissionner.

Manque de «courtoisie»

Invité au même moment sur le plateau de RMC, le porte-parole du gouvernement Benjamin Griveaux a déploré le manque de «courtoisie» du désormais ex-ministre envers M. Macron, tout en rendant «hommage au travail accompli».

Nicolas Hulot peut être «fier de son bilan», a commenté un peu plus tard l'Élysée auprès de l'AFP. «La détermination reste totale pour poursuivre dans la même direction et avec le même niveau d'ambition», a ajouté cette source qui confirme que M. Hulot n'avait pas prévenu le président.

«Il y aura un remaniement, mais pas dans l'immédiat», a précisé l'Élysée.

Courtisé de longue date par le pouvoir politique, M. Hulot a été une des recrues majeures du président Emmanuel Macron lors de la formation de son gouvernement, alimentant de nombreux espoirs.

Mais si l'ancien militant a enregistré des victoires comme l'abandon de la construction d'un aéroport à Notre-Dame-des-Landes dans l'ouest du pays, il a aussi connu des déceptions et a été contraint de faire des compromis.

Il avait notamment dû endosser le report de l'objectif consistant à ramener la part du nucléaire dans la production d'électricité à 50% en 2025, ou l'entrée en vigueur provisoire de l'accord de libre échange UE-Canada (Ceta). Et lundi, veille de l'annonce de sa démission, l'Élysée avait annoncé que le prix du permis de chasse serait diminué par deux.

«Quel gâchis! Il aura essayé, mais n'a jamais pu s'imposer dans un gouvernement pour lequel l'écologie n'est qu'un vernis», a commenté Jean-François Julliard, directeur général de Greenpeace France.

L'opposition a immédiatement réagi à la démission de M. Hulot pour tirer à boulets rouges sur Emmanuel Macron.

Le chef de la droite française et président du parti Les Républicains (LR) Laurent Wauquiez a ainsi déclaré qu'il pouvait «comprendre» que Nicolas Hulot «se sente trahi» par Emmanuel Macron, «comme pas mal de Français».

Pour le chef de file de la gauche radicale, Jean-Luc Mélenchon, ce départ constitue «un vote de censure contre Macron».

«Nicolas Hulot a eu du courage d'essayer de faire changer les choses à l'intérieur de ce gouvernent anti-écolo, c'est la fin d'une illusion et du bal des Tartuffes», a estimé pour sa part Yannick Jadot, tête de liste du parti écologiste EELV pour les élections européennes.