Il n'est pas citoyen britannique pour le moment, donc il ne vote pas. Mais en cette journée électorale, jeudi, Fahad Khan, un proche d'un des terroristes du pont de Londres, avait une demande pour le prochain gouvernement, quel qu'il soit : qu'il s'attaque une fois pour toutes aux influenceurs qui « lavent le cerveau » des candidats au djihad.

L'immigré pakistanais de 33 ans a accordé une longue entrevue à La Presse jeudi devant le centre d'entraînement Ummah Fitness Centre d'Ilford, dans l'est de Londres. Il s'y entraînait et y priait souvent aux côtés du mari de sa cousine, Khuram Butt, l'un des trois terroristes abattus par la police pendant l'attentat de samedi dernier.

Interrogé sur le bilan du gouvernement conservateur dans la lutte contre le terrorisme, M. Khan s'est voulu nuancé.

« Ils ont pris les moyens de combattre le terrorisme religieux. Mais il faut aussi s'attaquer à la racine du mal. Les gens qui donnent les instructions, les gens qui font du lavage de cerveau, les vidéos sur YouTube », dit-il.

« Je sais que Khuram suivait un imam sur Facebook », dit-il.

Divers médias américains et britanniques ont fait état cette semaine de l'intérêt porté par Khuram Butt au prédicateur américain Ahmad Musa Jibril, imam du Michigan connu pour ses vues radicales, souvent cité comme une influence par des suspects de terrorisme à travers le monde.

Mais certaines de ces influences ne passaient pas par internet : selon la BBC, Butt a fait partie de l'entourage du prêcheur britannique Anjem Choudary, condamné pour soutien à l'État islamique en septembre dernier. Dans une entrevue à La Presse en 2013, Choudary avait prévenu que le Canada risquait d'être victime d'un attentat en raison de sa politique étrangère. Les deux terroristes qui ont mené des attaques sur le sol canadien l'année suivante, Martin Couture-Rouleau et Michael Zehaf Bibeau, étaient abonnés à son fil Twitter.

Butt aurait aussi côtoyé au gymnase un certain Sajeel Shahid, citoyen britannique qui dirigeait un camp d'entraînement en fabrication d'explosifs au Pakistan au début des années 2000. M. Khan a confirmé à La Presse jeudi qu'il avait vu Sajeel Shahid au gymnase à plusieurs reprises, mais qu'il le connaissait sous un nom d'emprunt et ignorait son passé.

INFLUENCEUR OU INFLUENCÉ ?

Mais à Londres, plusieurs personnes voyaient en Khuram Butt lui-même plutôt un « influenceur » qu'un « influencé ». Des voisins ont raconté à La Presse comment il tournait autour des enfants du voisinage et tentait de les endoctriner.

M. Khan reconnaît que le mari de sa cousine propageait autour de lui des vues radicales, mais il se rend compte aujourd'hui qu'il n'avait pas pris la chose suffisamment au sérieux.

« Il avait dit qu'il voulait quitter ma cousine, qu'il voulait aller en Syrie. Il parlait de l'État islamique, pour qui c'était justifiable de tuer des gens. Mais je ne voulais pas argumenter avec lui, je prenais ça en riant. Je crois que ça aurait pu virer à la dispute », dit-il.

« On n'aurait jamais pu imaginer qu'il irait jusqu'à faire ça. »

photo toby melville, reuters

Fahad Khan s'entraînait et priait souvent au centre d'entraînement Ummah Fitness Centre d'Ilford, dans l'est de Londres, aux côtés du mari de sa cousine, Khuram Butt, l'un des trois terroristes abattus par la police pendant l'attentat de samedi dernier.

photo adrian dennis, archives agence france-presse

Selon la BBC, Khuram Butt a fait partie de l'entourage du prêcheur britannique Anjem Choudary, condamné pour soutien à l'État islamique en septembre dernier.