D'où viennent les migrants qui risquent leur vie dans des rafiots surchargés et lancés en pleine mer Méditerranée? Quelles routes empruntent-ils pour atteindre l'Europe? Voici quelques points de repère.

1. LA ROUTE CENTRALE

C'est la route la plus fréquentée - et la plus meurtrière - en mer Méditerranée. Elle mène des côtes libyennes à celles de l'Italie et de Malte. La Libye est devenue un tremplin vers l'Europe pour les migrants originaires de l'Afrique subsaharienne. Les passeurs exploitent le chaos libyen, la porosité de ses frontières terrestres et la quasi-inexistence de patrouilles côtières. En face, l'Italie, sur la ligne de front, exhorte le reste de l'Europe à en faire plus pour endiguer cet immense flot d'hommes, de femmes et d'enfants désespérés.

L'an dernier, 170 760 migrants ont choisi cette route pour entrer en Italie. Il s'agit du plus grand flux de migrants dans un seul pays de l'histoire de l'Union européenne.

2. LA ROUTE DE L'EST MÉDITERRANÉEN

Il y a trois ans, c'était la route la plus fréquentée par les migrants, qui lui préfèrent désormais la route centrale. Néanmoins, elle reste un passage majeur, le second en importance, pour l'Europe. Les réseaux de passeurs sont très actifs à Istanbul; les migrants d'Afrique et d'Asie partent de la Turquie pour atteindre la Grèce, Chypre et le sud de la Bulgarie. Ce chemin est utilisé par bon nombre de réfugiés syriens qui fuient la guerre civile. Mais les migrants viennent aussi d'autres pays instables ou en proie à des conflits, comme l'Afghanistan, l'Irak et la Somalie.

L'an dernier, 50 830 migrants ont emprunté cette route.

3. LA ROUTE DE L'OUEST MÉDITERRANÉEN

Autrefois très fréquentée, cette route l'est de moins en moins par les migrants qui veulent gagner l'Espagne en passant par Maroc. Il y a 10 ans, des milliers de migrants ont gravi la clôture ceinturant les enclaves espagnoles de Ceuta et Melilla, situées en territoire marocain, dans l'espoir d'obtenir l'asile en Europe. Depuis, l'Espagne a renforcé ses frontières, augmentant la surveillance dans ses ports et les patrouilles le long de ses côtes. D'autre part, la crise économique dans ce pays a découragé bien des migrants d'y tenter leur chance.

L'an dernier, 7840 personnes - originaires du Maroc, de l'Algérie, mais aussi d'Afrique de l'Ouest - ont emprunté cette route.

4. ÉRYTHRÉE

Chaque année, un nombre effarant de migrants provient de l'Érythrée, petit pays de la corne de l'Afrique. En 2014, plus de migrants étaient originaires de l'Érythrée que de tout autre pays, sauf la Syrie. Pourtant, l'Érythrée est minuscule par rapport à la Syrie - et n'est pas ravagée par la guerre civile. La plupart des Érythréens interceptés en Europe affirment que c'est la conscription militaire, d'une durée indéterminée, qui les a poussés à fuir. Mais le peuple y subit aussi une dure répression, en plus de vivre sous la menace constante d'être jeté en prison et torturé... simplement pour avoir offensé une personne en autorité.

L'an dernier, 34 329 des migrants qui ont atteint l'Europe par la mer Méditerranée étaient érythréens.

5. PALESTINE

De plus en plus de Palestiniens font la périlleuse traversée pour l'Europe. La plupart sont jeunes et proviennent de la bande de Gaza, cette enclave palestinienne frappée par la pauvreté, le chômage et le blocus israélien. Depuis sept ans, Gaza a aussi été le théâtre de trois guerres, la dernière d'une violence jamais vue par les jeunes. Bon nombre d'entre eux ont perdu espoir d'y mener une vie normale; ils passent par les tunnels clandestins creusés au sud de la bande de Gaza pour atteindre l'Égypte, puis la Libye, avant de s'embarquer pour l'Europe.

L'an dernier, 6082 des migrants qui ont traversé la mer Méditerranée étaient palestiniens.

6. AFRIQUE DE L'OUEST

Depuis le début de l'année 2015, ce n'est plus la Syrie qui fournit le plus grand contingent de migrants interceptés en mer Méditerranée. Ce sont les pays d'Afrique de l'Ouest. Bon nombre d'entre eux sont poussés par une situation économique difficile et voyagent en quête d'une vie meilleure en Europe. D'autres proviennent de régions durement touchées par le virus Ebola. Enfin, de plus en plus de migrants fuient les violents miliciens du groupe armé Boko Haram, qui continuent de dévaster la région.

L'an dernier, 27 645 des migrants passés en Europe provenaient du Mali, du Nigeria et de la Gambie. Si la tendance se maintient, le bilan global risque d'exploser en 2015.

Sources: Frontex, Organisation internationale pour les migrations (OIM)

EN CHIFFRES

1750

Nombre de migrants qui ont péri dans des naufrages en mer Méditerranée depuis janvier 2015, dont 800 dimanche.

1300

Nombre de migrants qui se sont noyés, rien qu'en avril, en tentant d'atteindre les côtes italiennes depuis la Libye. C'est presque autant que le nombre de victimes du naufrage du Titanic.

Sources : Agence des Nations unies pour les réfugiés, OIM, Frontex