Le premier ministre grec, Alexis Tsipras, estime que «les questions qui se posent sur ces cinq dernières années de plans d'austérité sont immenses» et que «le peuple a le droit d'avoir des réponses».

M. Tsipras s'est exprimé lundi soir au Parlement à propos de la création d'une commission d'audit de la dette grecque, qui était une promesse de campagne.

Constituée de scientifiques et de juristes, la commission vise à déterminer l'origine de la dette grecque et des plans d'austérité mis en place à partir de 2010 en échange de l'aide financière de l'UE, de la BCE et du FMI.

«L'objectif est de déterminer l'éventuel caractère odieux, illégal ou illégitime des dettes publiques contractées par le gouvernement grec», avait précisé la présidente de l'Assemblée, Zoé Konstantopoulou, en mars, lors de la présentation de la commission qui devrait rendre ses premières conclusions en juin.

«Le peuple grec a besoin de comprendre comment le pays a accepté des mesures qui ont fait augmenter la dette, passée de 124 % du PIB au début de la crise à 175 % aujourd'hui, qui ont conduit à l'augmentation du chômage, aux baisses des salaires et à l'exode des jeunes diplômés», a déclaré M. Tsipras.

«La commission doit examiner les conséquences désastreuses du PSI (échange de dette mené par le secteur privé en mars 2012) sur les caisses d'assurance et comment cela a permis d'alléger la charge des banques allemandes».

Il a été chahuté par les députés socialistes du Pasok et conservateurs de la Nouvelle Démocratie (l'ancienne coalition au pouvoir) qui ont annoncé ne pas voter pour la création de cette commission.

Celle-ci étudiera la période entre mai 2010, date du premier mémorandum entre la Grèce et ses créanciers, à janvier 2015, date de l'arrivée au pouvoir de la gauche radicale.

Ce choix de dates est contesté par le groupe parlementaire socialiste, soulignant que la dette a considérablement augmenté durant le mandat de la Nouvelle Démocratie entre 2004 et 2009.

La Nouvelle Démocratie a fait une contre-proposition pour que la question de l'origine de la dette soit étudiée sur une période allant de 1981 à aujourd'hui.

«Nous allons démontrer bientôt que la Grèce est un pays indépendant et respectable», a assuré M. Tsipras alors que les négociations avec les créanciers se poursuivent et qu'un bilan de ses propositions devrait être fait en conférence téléphonique mercredi du groupe de travail de l'Eurogroupe.

Durant ce débat parlementaire qui avait débuté samedi, le secrétaire d'État au Budget, Dimitris Mardas, a indiqué que ses services avaient évalué à 278,7 milliards d'euros (plus de 378 milliards de dollars) le montant des réparations de guerre dues par l'Allemagne à la Grèce à la suite de l'occupation du pays par les nazis entre 1941 et 1944.

Le débat sur les réparations allemandes a ressurgi depuis le début de la crise économique en Grèce et le gouvernement Syriza revendique le paiement de ces réparations.

Selon M. Mardas, la somme de 278 milliards comprend un prêt forcé de 10,3 milliards d'euros (près de 14 milliards de dollars) exigé de la Banque de Grèce par les occupants ainsi que les dommages subis par les «particuliers et les infrastructures» du pays.

Un rapport de la Comptabilité nationale grecque avait dans le passé évalué le montant des réparations à 162 milliards d'euros (près de 220 milliards).

Pour Berlin, la question des réparations et des dédommagements de guerre a été définitivement réglée via des traités internationaux.

Washington à jouer les intermédiaires entre la Grèce et ses créanciers

Le gouvernement américain est prêt à jouer les «médiateurs de bonne foi» dans la négociation entre la Grèce et ses créanciers, a assuré mardi le ministère grec des Finances dans un communiqué.

Faisant le bilan de la visite à Washington du ministre des Finances grec Yanis Varoufakis dimanche et lundi, le ministère se félicite que «les responsables américains aient dit l'importance que donne le gouvernement Obama à un accord honnête entre la Grèce et ses partenaires, et au maintien de l'unité de la zone euro».

«Ils ont souligné que le gouvernement américain veut jouer un rôle de +médiateurs de bonne foi+ pour parvenir à une telle solution dès que possible, en poussant dans cette direction toutes les parties prenantes à la négociation», affirme Athènes.

M. Varoufakis a rencontré dimanche la directrice générale du FMI Christine Lagarde, et lundi Nathan Sheets, sous-secrétaire au Trésor américain chargé des affaires internationales, et Caroline Atkinson, la conseillère de Barack Obama pour les affaires économiques internationales.

Dans un communiqué, Mme Lagarde s'était pour sa part félicitée de la bonne volonté de M. Varoufakis à vouloir faire avancer les choses, et saluer le fait que la Grèce se soit engagée à honorer son prochain remboursement au FMI, dû le 9 avril.

À en croire le communiqué du ministère des Finances, Mme Lagarde a indiqué au cours de l'entretien que le Fonds monétaire international était «prêt à démontrer un maximum de flexibilité dans la façon dont il évaluerait les réformes et les propositions budgétaires» d'Athènes.

La discussion a témoigné d'un «effort de consensus en vue d'une meilleure compréhension de la réalité grecque», ajoutent les services de M. Varoufakis.

L'heure tourne pour les caisses de l'État grec, alors que l'UE et la BCE n'ont plus rien versé à Athènes depuis août dernier, faute d'obtenir en échange des engagements de réformes qui leur paraissent suffisants.

Le nouveau gouvernement de gauche radicale Syriza, arrivé au pouvoir fin janvier, a jusqu'à fin avril pour présenter à ses créanciers un programme de réformes qui les incitent à débloquer 7,2 milliards d'euros (9,8 milliards de dollars), la dernière tranche d'aide européenne promise à la Grèce dans le cadre du programme de prêts de 240 milliards d'euros (325 milliards de dollars) mis en place depuis 2010 par ses créanciers (UE, BCE, FMI).