Un tribunal russe a rejeté vendredi la demande de libération anticipée de Nadejda Tolokonnikova, l'une des deux jeunes femmes du groupe contestataire Pussy Rio, qui purge une peine de deux ans de camp pour une «prière punk» en 2012 contre Vladimir Poutine.

«Accorder une libération anticipée à Tolokonnikova est prématuré», a déclaré la juge Lidia Iakovleva, expliquant que la condamnée ne s'était pas repentie et qu'elle avait eu des réprimandes pendant sa détention.

«Le tribunal estime que les arguments de la défense sont peu convaincants», a ajouté la présidente du tribunal Zoubovo-Polianski, dans la région de Mordovie (640 km à l'est de Moscou), où Tolokonnikova purge sa peine.

La décision a été accueillie par des cris de «Honte!» dans la salle d'audience, où se trouvaient notamment le père et le mari de Tolokonnikova.

Portant une tenue de prisonnier de couleur vert foncé, la condamnée a écouté en silence la lecture de la décision depuis une cage en métal.

La défense a aussitôt annoncé son intention de faire appel.

«J'ai passé assez de temps en camp, j'en ai assez de l'étudier», a déclaré Tolokonnikova, 23 ans, lors de l'audience.

Selon la législation russe, toute personne condamnée peut bénéficier d'une libération conditionnelle après avoir purgé la moitié de sa peine, ce qui est le cas de Nadejda Tolokonnikova qui avait déjà effectué six mois de détention provisoire avant sa condamnation à l'été 2012.

Son avocate, Irina Khrounova, a souligné devant le tribunal que la jeune femme avait un enfant en bas âge.

«Elle a une famille, un enfant. Elle manque à sa fille, il est indispensable que la famille soit réunie de nouveau pour permettre à l'enfant de se développer pleinement», a-t-elle plaidé.

La défense a par ailleurs lu un appel signé par plusieurs défenseurs des droits de l'homme, parmi lesquels l'ex-dissidente soviétique Lioudmila Alexeeva, et le directeur de l'ONG Memorial, Oleg Orlov.

«Nous jugeons inutile d'isoler encore Tolokonnikova de la société», écrivent-ils dans cette lettre.

Nadejda Tolokonnikova, Maria Alekhina et Ekaterina Samoutsevitch avaient été arrêtées en février 2012 dans la cathédrale du Christ-Sauveur à Moscou, où elles avaient dansé et chanté une «prière punk» demandant à la Sainte-Vierge de «chasser Poutine», pour dénoncer une collusion entre l'Église orthodoxe et le pouvoir politique.

En août, elles avaient été condamnées à deux ans de camp pour «hooliganisme» et «incitation à la haine religieuse».

À l'issue du procès en appel en octobre, Ekaterina Samoutsevitch avait vu sa peine commuée en sursis et avait été libérée.

L'été dernier, Madonna avait apporté son soutien aux membres des Pussy Rio lors de concerts à Moscou et Saint-Pétersbourg.

Les jeunes femmes ont obtenu le soutien d'autres artistes tel Yoko Ono, et un documentaire sur leur procès a gagné un prix spécial du jury au festival du film indépendant américain Sundance.

L'affaire des Pussy Riot a profondément divisé la société en Russie, mais le groupe est devenu depuis un symbole de la protestation contre le régime du président Vladimir Poutine, que l'opposition accuse d'atteintes aux libertés.