La Belgique arrive à court de solutions pour résoudre la plus longue crise politique de son histoire avec la démission attendue mercredi d'un médiateur royal entre Flamands et francophones, qui rapproche la perspective d'élections anticipées.

Le médiateur, le sénateur socialiste Johan Vande Lanotte, «va présenter sa démission» au roi Albert II, a indiqué à l'AFP une source proche des négociations.

Il est arrivé en fin d'après-midi au Palais Royal pour y jeter l'éponge, après avoir échoué à rapprocher partis politiques flamands et francophones sur une réforme des institutions nationales et sur la formation d'un gouvernement, toujours introuvable depuis les élections législatives de juin 2010.

Désigné le 21 octobre pour tenter de rapprocher les points de vue, M. Vande Lanotte avait démissionné une première fois le 6 janvier, suite au refus de ses propositions de compromis par les deux principaux partis flamands, les indépendantistes de la Nouvelle Alliance Flamande (N-VA) et les chrétiens-démocrates du CD&V.

Le roi, faute d'alternative, avait refusé et l'avait remis en selle.

Mais après diverses rencontres avec les sept partis impliqués dans les tractations - trois formations francophones et quatre flamandes - il n'a même pas réussi à les réunir toutes ensemble autour d'une même table.

La Belgique reste donc dans l'immédiat administrée, et ce depuis l'été 2010, par un cabinet chargé d'expédier uniquement les affaires courantes.

En la matière, le pays a déjà battu le 8 janvier le record d'Europe de la plus longue crise politique, détenu jusque là par son voisin néerlandais, qui avait mis 208 jours pour former un gouvernement en 1977.

Il se dirige à présent vers un record du monde peu glorieux, détenu par l'Irak, à qui il avait fallu 289 jours pour former un cabinet en 2009.

Les points de blocage sont toujours les mêmes depuis des mois.

Les francophones de Wallonie et Bruxelles veulent limiter l'autonomie nettement renforcée que réclament les Flamands (60% des quelque 11 millions de Belges), de crainte de perdre des transferts financiers de la part de la Flandre et par peur que cela marque le début de la fin pour le pays.

Ces derniers jours, les néerlandophones ont réclamé un transfert total des compétences fédérales en matière de politique de l'emploi et de paiement des allocations chômage aux régions, que sont la Flandre, la Wallonie et Bruxelles.

Ils ont aussi contesté la spécificité de Bruxelles en tant qu'entité indépendante au profit d'une co-gestion avec les francophones. Ces derniers ont refusé dans les deux cas.

Le nouveau blocage intervient à un moment délicat pour la Belgique. Elle est dans le collimateur des marchés financiers, qui la considèrent comme un maillon faible de la zone euro et un candidat potentiel à un plan de sauvetage européen, après la Grèce et l'Irlande, si la crise politique n'est pas rapidement réglée.

Le ras-le-bol parmi la population commence aussi à grandir. Celle-ci est sortie de son apathie dimanche, lorsque plus de 30.000 personnes ont manifesté à Bruxelles pour exhorter les partis politiques à former un gouvernement.

Le roi a encore la possibilité d'essayer de relancer les négociations, en nommant un nouveau médiateur ou en élargissant le cercle des formations qui discutent aux libéraux afin d'amadouer la N-VÀ qui, sur le plan économique et social, en est proche.

Mais les options se raréfient. En cas de persistance de l'impasse, le roi n'aura d'autre choix que de convoquer de nouvelles élections législatives anticipées, moins d'un an après les précédentes. Et surtout avec le risque d'une radicalisation supplémentaire des fronts flamand et francophone, susceptible d'accélérer la marche vers l'éclatement du pays.