La Russie a été condamnée par le tribunal d'arbitrage de Stockholm pour «expropriation illégale» pour avoir démantelé le géant pétrolier Ioukos du magnat pétrolier russe, Mikhaïl Khodorkovski, ennemi juré du premier ministre Vladimir Poutine, a rapporté jeudi la presse russe.

La plainte contre l'État russe avait été déposée par un actionnaire minoritaire de Ioukos, le britannique RosinvestCO UK Ltd, qui se voit attribuer des indemnités de 14,3 millions de dollars. Moscou a fait appel de sa condamnation.

«Dans cette affaire l'expropriation est illégale, n'est pas dans l'intérêt général, est discriminatoire et a été effectuée sans versement d'indemnisations», assène ce tribunal dans une décision datant du mois de septembre mais qui n'avait pas été rendue publique, révèle le quotidien économique Vedomosti.

Les décisions du tribunal d'arbitrage de la Chambre de Commerce de Stockholm sont confidentielles et l'institution ne communique jamais sur les litiges qu'elle traite.

Le journal a mis le texte de la décision en ligne sur son site

L'avocat russe Guenrikh Padva, qui avait défendu les intérêts de M. Khodorkovski lors de son premier procès en 2005, a salué jeudi cette décision «civilisée».

«On peut citer une série d'arguments qui confirmeraient que ce qui s'est passé (avec Ioukos) est illégal. De ce point de vue, on peut saluer cette décision», a déclaré Me Padva à l'antenne de la radio Echo de Moscou.

Selon Vedomosti, si tous les anciens actionnaires de Ioukos remportaient des procès similaires, la Russie pourrait avoir à payer plus de dix milliards de dollars.

Le tribunal de Stockholm a jugé que l'État russe s'était rendu coupable de multiples infractions dans le dossier Ioukos, estime Vedomosti.

En particulier, les juges notent que Moscou n'a poursuivi que le groupe de M. Khodorkovski pour fraudes fiscales, alors que d'autres compagnies pétrolières ayant opéré de la même manière n'étaient pas inquiétées, ce qui témoignent de «discrimination».

Par ailleurs, le tribunal a jugé illégale la prise de contrôle en 2004 par l'État russe de la principale filiale de Ioukos, Iouganskneftegaz, à l'issue d'un appel d'offres opaque remporté par une société inconnue qui n'avait pas de bureaux et agissait en fait pour le compte du pétrolier d'État, Rosneft.

Arrêté en 2003, Mikhaïl Khodorkovski a été condamné pour des crimes économiques une première fois à 8 ans en 2005, puis en décembre dernier à une peine cumulée de 14 ans de prison, ce qui devrait le maintenir derrière les barreaux jusqu'en 2017.

Ses déboires judiciaires sont considérés par l'opposition russe et nombre d'observateurs comme une affaire politique orchestrée par le président d'alors, Vladimir Poutine, soucieux de mettre la main sur d'importants actifs pétroliers et de mettre au pas un homme d'affaires trop indépendant et qui finançait l'opposition.