La mobilisation de journalistes et militants d'opposition après l'agression d'un reporter du journal Kommersant met le président russe Dmitri Medvedev, qui affiche son attachement à l'État de droit, face à ses engagements.

Le chef de l'État a promis de retrouver les auteurs de cette agression.

Quelque 500 personnes ont manifesté sur la place Pouchkine à Moscou, non loin du Kremlin demandant que «cesse la terreur» contre les journalistes.

«Arrêtez la terreur!», «On n'a pas peur», «Qui a tabassé Oleg Kachine?», «Lorsqu'on tabasse un journaliste on tabasse son lecteur», pouvait-on lire sur leurs banderoles.

Oleg Kachine, 30 ans, est sorti jeudi du coma artificiel dans lequel il était plongé après une agression sauvage vendredi.

Ses collègues et proches continuent par ailleurs d'entretenir un piquet devant le siège de la police criminelle de Moscou, s'y succédant un à un pour réclamer que les «exécutants et les commanditaires» de l'attaque soient retrouvés.

Alors que la presse exposait diverses hypothèses impliquant pour certaines des personnalités haut placées, le président Medvedev a promis lundi de «punir» les coupables «indépendamment de leur statut».

Mais les dizaines d'assassinats et d'agressions commis ces dernières années contre des journalistes ont rarement été élucidés.

Même le conseiller pour les droits de l'homme du Kremlin, Mikhaïl Fedotov, a mis en doute la parole présidentielle: «Quand pourra-t-on trouver les commanditaires? C'est là la question, car c'est un crime difficile à élucider», a-t-il déclaré.

M. Medvedev avait déjà promis avec la même fermeté en 2009 que les assassins de la représentante en Tchétchénie de l'ONG Mémorial, Natalia Estemirova, seraient retrouvés. L'enquête n'a toujours pas abouti.

Dans les deux cas, les engagements du président russe ont été salués par les Occidentaux, désireux d'encourager toute promesse de changement en la matière.

Le prédécesseur de M. Medvedev, Vladimir Poutine, actuel premier ministre, avait pour sa part choqué ses détracteurs en minimisant l'importance du meurtre en 2006 de la journaliste d'opposition Anna Politkovskaïa, dont il avait jugé «insignifiante» l'influence dans le pays.

Les autorités russes apparaissent plus volontaires avec l'affaire Oleg Kachine: les télévisions russes y ont accordé une large place, une unité d'élite du comité d'enquête du parquet a été chargée des investigations et un projet de loi est à l'étude pour alourdir les peines en cas d'attaque contre un journaliste.

Le même comité d'enquête a repris jeudi les enquêtes dans deux affaires similaires.

Il s'agit de l'assassinat en 2000 d'Igor Domnikov, journaliste à Novaïa Gazeta. Ses tueurs ont été condamnés, mais le commanditaire n'a jamais été arrêté.

Le comité a aussi rouvert l'enquête sur l'attaque en novembre 2008 contre Mikhaïl Beketov, rédacteur en chef d'un journal de la banlieue de Moscou qui se battait contre la construction d'une autoroute.

M. Beketov a passé des mois dans le coma, a été amputé d'une jambe et ne peut toujours pas parler. Ni les agresseurs, ni le commanditaire n'ont été retrouvés.

Oleg Kachine couvrait lui aussi cette affaire. Deux jours avant son agression, un autre opposant à ce chantier controversé, Konstantin Fetissov, a été grièvement blessé au cours d'une attaque similaire.

Quant au journaliste Anatoli Adamtchouk, un journaliste de la banlieue de Moscou hospitalisé après une agression dimanche, la police locale l'a accusé mercredi d'avoir commandité une mise en scène. L'intéressé dément.