Le président français Nicolas Sarkozy est resté inflexible mercredi dans sa volonté de conduire jusqu'au bout sa réforme des retraites, malgré une mobilisation record de la rue mardi et la poursuite de la grève dans les chemins de fer et les raffineries.

Le président a dit «que c'était un devoir de réaliser cette réforme et qu'on la mène donc jusqu'au bout», a rapporté à la presse la secrétaire d'État à la Famille, Nadine Morano, après le Conseil des ministres.

Le chef de l'État a déclaré plus tard que le gouvernement ne pouvait «aller plus loin» dans les concessions, ont indiqué des députés quelques jours avant une nouvelle journée de manifestations prévue samedi.

Nicolas Sarkozy a fait de cette réforme le symbole de son engagement à changer la France; il a concédé jusqu'ici quelques aménagements mais n'entend pas revenir sur le coeur du projet: le report de l'âge de départ à la retraite (de 60 à 62 ans pour l'âge minimal, de 65 à 67 ans pour une retraite à taux plein).

Ces dispositions-clés ont déjà été adoptées par les parlementaires.

«J'ai toujours dit que les manifestants devaient être respectés et que leur opinion devait être entendue. Mais la responsabilité du gouvernement et de la majorité, c'est de défendre l'intérêt général», a martelé le premier ministre François Fillon devant les députés.

Face à cette inflexibilité, les syndicats ne désarment pas. Mardi, pour la quatrième journée d'action depuis la rentrée contre cette réforme impopulaire, entre 1,2 et 3,5 millions de personnes (selon les sources) ont manifesté. Ce qui constitue un niveau record de mobilisation. Et, fait nouveau, les jeunes ont fait leur entrée dans la contestation.

Les syndicats parient sur un nouveau succès des manifestations de samedi, espérant rassembler une population familiale qui ne participe généralement pas aux rassemblements organisés en semaine.

«Le combat n'est pas terminé», a prévenu sur la radio BFM le patron du syndicat Force ouvrière Jean-Claude Mailly, estimant que le gouvernement était «responsable» du durcissement du mouvement.

Mercredi, le nombre de salariés qui reconduisaient la grève de la veille restait cependant limité.

Le mouvement affecte surtout le secteur énergétique: huit des douze raffineries françaises étaient en cours d'arrêt.

Les industriels du secteur soulignent que les stations-service continuent à être alimentées par les dépôts pétroliers. Mais certaines connaissent déjà des difficultés en raison d'achats inhabituellement élevés d'automobilistes inquiets. Si les grèves se poursuivent, ils pourraient commencer à manquer de carburant la semaine prochaine.

Une grève reconductible a aussi été votée pour 24h00 sur les trois terminaux de réception du méthane en France.

Côté transports, la grève dans les chemins de fer s'essoufflait, avec 24,6% de grévistes, contre 40,4% la veille, selon la direction de la SNCF.

«Il faut trouver les moyens d'augmenter la pression sur le gouvernement pour qu'il entende cette revendication à la négociation», a déclaré Bernard Thibault le leader de la CGT, l'un des deux principaux syndicats français, tout en se gardant d'appeler à une généralisation des grèves.

L'opposition a, quant à elle, mis en garde contre les risques de voir la situation dégénérer. La patronne du Parti socialiste Martine Aubry a évoqué la possibilité «d'affrontements». Mardi, 61 personnes ont été interpellées et 45 inculpées pour des faits présumés de violences, en marge des manifestations.

L'ex-candidate socialiste à la présidentielle Ségolène Royal a pour sa part estimé que le retrait de la réforme calmerait la «colère» des jeunes. Plusieurs responsables du camp présidentiel, dont Nicolas Sarkozy, ont répété que les appeler à manifester était «irresponsable».