La justice espagnole a interdit samedi une nouvelle manifestation à Bilbao en faveur du bras politique interdit de l'ETA, Batasuna, et un important dispositif policier était attendu samedi après-midi dans la capitale économique du Pays basque (nord) pour empêcher sa tenue.

Cette interdiction intervient moins d'une semaine après l'annonce d'un cessez-le-feu aux contours flous par le groupe armé ETA, tenu pour responsable de la mort de 829 personnes en un demi-siècle de violences pour l'indépendance basque.

L'Audience nationale a décidé d'interdire expressément ce nouveau rassemblement car son «objectif» est «de contourner l'interdiction judiciaire» décrétée jeudi contre une manifestation similaire convoquée à la même heure et au même endroit, selon sa décision écrite dont l'AFP a eu copie.

Jeudi, l'Audience nationale, haute instance pénale, avait interdit le rassemblement convoqué par l'organisation Adierazi EH («exprime-toi Pays basque»), proche de Batasuna, estimant que cette manifestation conduisait à «soutenir et justifier les actions de l'organisation terroriste ETA».

Le gouvernement régional basque a annoncé samedi qu'il prendrait les «mesures nécessaires et préventives pour éviter» le rassemblement. Un important dispositif policier avait été mis en place à l'endroit et à l'heure où la manifestation était prévue, à Bilbao, en fin d'après-midi.

Cette manifestation avait été convoquée pour défendre la «liberté d'expression» au Pays basque en référence à l'interdiction depuis 2003 par la justice espagnole de Batasuna en raison de ses liens avec l'ETA dont il ne condamne pas explicitement la violence.

L'organisation armée ETA, a annoncé dimanche dernier un arrêt de ses «actions offensives armées», sans préciser si cet arrêt était temporaire ou définitif.

Le chef du gouvernement espagnol José Luis Rodriguez Zapatero a rejeté ce cessez-le-feu, soulignant que «la seule décision qui vaille est l'abandon des armes pour toujours» et le ministre de l'Interieur a assuré que la politique sécuritaire contre toute la mouvance de l'ETA ne changerait «pas d'un iota».

La justice espagnole considère toujours Batasuna comme partie intégrante de l'ETA, sous les ordres stricts de cette organisation clandestine, même si le parti indépendantiste a paru récemment se distancier du groupe armé, réclamant de lui un arrêt de la violence et scellant une alliance inédite avec le parti indépendantiste légal et non-violent Eusko Alkartasuna (EA).

L'avocat sud-africain Brian Currin, ancien médiateur dans le processus de paix nord-irlandais et actuel conseiller de Batasuna, a estimé samedi que cette interdiction était une erreur alors que Batasuna exerce une pression «sans précédent» pour que l'ETA cesse la violence.

Dans une interview à El Pais, M. Currin a reconnu que le cessez-le-feu sans précision annoncé par l'ETA n'était pas suffisant même s'il constituait «un pas en avant important».

De son côté, Inigo Urkullu, président du Parti nationaliste basque PNV (centre-droit) qui a gouverné le Pays basque pendant 30 ans avant de céder le pouvoir en 2009 aux socialistes, a qualifié de «retour en arrière et provocation» l'interdiction de la manifestation.