L'ancien ministre français de l'Intérieur Charles Pasqua, figure de la droite française, a été condamné vendredi à un an de prison avec sursis, à l'issue d'un procès pour trois affaires de malversations financières.

«C'est peut-être une condamnation avec sursis - nous verrons ce que nous en ferons - mais c'est aussi deux relaxes de plus», s'est réjoui M. Pasqua, ministre de l'Intérieur de 1986 à 1988 et de 1993 à 1995, qui était jugé pour «corruption passive» et «complicité d'abus de biens sociaux et de recel».

Jeudi, le parquet avait demandé aux juges de condamner Charles Pasqua, aujourd'hui sénateur, à une peine beaucoup plus lourde: quatre ans de prison, dont deux avec sursis, une amende de 200 000 euros ainsi que la «privation des droits électifs».

L'ancien ministre, 83 ans, a été relaxé dans deux des trois affaires jugées par la Cour de justice de la République (CJR), une juridiction spéciale compétente pour statuer sur les faits commis par des membres du gouvernement dans l'exercice de leurs fonctions.

La condamnation à un an de prison avec sursis porte sur des détournements de fonds au préjudice d'une société d'exportation d'armes, la Sofremi, placée sous la responsabilité du ministère de l'Intérieur.

Dans cette affaire, la justice s'intéressait à des commissions injustifiées s'élevant à quelque 36 millions de francs (5,4 MEUR) versées pour quatre marchés au Koweït, en Colombie, en Argentine et au Brésil.

L'ex-ministre a en revanche été innocenté d'accusations de corruption concernant une autorisation d'exploitation d'un casino à Annemasse (est) en échange présumé d'un financement électoral ultérieur, et pour un pot-de-vin supposé extorqué au groupe GEC-Alsthom (aujourd'hui Alstom) en contrepartie du déménagement d'une de ses filiales.

«Les accusations de corruption ont disparu. Cela n'a pas résisté à l'examen objectif, comment peut-on imaginer que je me sois laissé corrompre», s'est indigné M. Pasqua.

Jeudi, la défense de Charles Pasqua avait exhorté les quinze juges de la CJR - 3 magistrats et 12 parlementaires - à se «débarrasser des préjugés et des rumeurs», estimant que les accusations de malversations financières à l'encontre de l'ancien ministre avaient tourné au «guet-apens judiciaire».

À la CJR, Charles Pasqua a adressé ces derniers mots jeudi soir: «Je vous demande de ne vous souvenir que d'une chose: vous ne me devez rien, vous devez vous déterminer en votre âme et conscience. Moi j'ai ma conscience pour moi, j'ai servi mon pays, et je ne regrette rien».

Charles Pasqua fut une personnalité incontournable de la droite française et du gaullisme, dans les années 1980 et 1990, et un ministre de l'Intérieur connu pour sa posture de fermeté, qu'il s'agisse de l'immigration ou de la lutte contre la criminalité et le terrorisme.

Il est aussi un homme de réseaux, notamment en Afrique et en Corse, son île d'origine, ce qui lui a souvent valu une réputation sulfureuse.

L'ancien ministre a longtemps été proche de l'ex-président Jacques Chirac, dont il fut l'un des mentors en politique. Il s'en était cependant éloigné à la fin des années 1990, prenant en particulier des positions anti-européennes.

Il a déjà été condamné dans plusieurs affaires par des juridictions ordinaires, pour des faits commis lorsqu'il n'était pas ministre. Une peine d'un an de prison ferme, pour laquelle il a fait appel, a ainsi été prononcée contre lui l'an dernier dans une affaire de trafic d'armes vers l'Angola, dite Angolagate.