L'ancien dictateur panaméen Manuel Noriega a demandé mardi à la justice française son rapatriement au Panama, quelques heures après son extradition des États-Unis vers la France où il a été placé en détention avant un procès pour blanchiment d'argent de la drogue.

«Comme prisonnier de guerre, j'ai droit à tout ce que la convention de Genève prévoit, comme le rapatriement à la fin de la captivité», a déclaré l'ancien dirigeant, âgé de 76 ans, au cours de l'audience.

Les États-Unis où il a été condamné pour trafic de drogue et où il a passé 20 ans en détention, lui ont conféré le statut de prisonnier de guerre. Selon ses avocats, le général Noriega bénéficie toujours de ce statut une fois transféré en France.

L'ancien dirigeant panaméen a fait ces premières déclarations en France lors d'une audience publique devant un juge de la liberté et de la détention du tribunal de Paris, qui a ordonné son placement en détention dans l'attente de son procès. Ses avocats ont annoncé leur intention de faire appel de cette décision.

Cheveux de jais coiffés en arrière, chemise blanche et blouson de toile noir, l'homme, dont les traits sont tirés et le dos voûté, est apparu physiquement diminué, mais son regard était vif.

Il était arrivé tôt mardi matin à Paris, à bord d'un vol de la compagnie Air France, en provenance de Miami, en Floride, après une décision américaine de l'extrader vers la France.

«Nous allons tout faire pour démontrer que sa place n'est pas en France, que cet homme doit rentrer dans son pays, le Panama, qui d'ailleurs le demande également», a affirmé l'un de ses avocats français, Olivier Metzner. Il a ajouté que Manuel Noriega, «sous traitement médical», était «très affaibli».

Manuel Noriega a déjà été jugé en France en 1999 et condamné par défaut à 10 ans de prison. Lors de ce procès, tenu en son absence, la justice français l'a reconnu coupable d'avoir blanchi en France plusieurs millions d'euros provenant du cartel de la drogue de Medellin (Colombie).

Une vingtaine de comptes avaient été ouverts à Paris et à Marseille par M. Noriega ou certains de ses proches dans les banques BNP, CIC, le Crédit lyonnais et Banco do Brazil.

Entendu lors de l'instruction dans sa prison de Miami, Manuel Noriega avait affirmé que l'argent investi en France provenait de sa fortune personnelle et de la CIA dont il fut un informateur.

La procédure française prévoit un nouveau procès, cette fois-ci en présence de l'accusé.

Longtemps allié des États-Unis pendant la Guerre froide, Noriega était tombé en disgrâce à Washington pour son implication dans un trafic de stupéfiants. Il avait été renversé puis capturé en 1989 lors de l'intervention américaine au Panama ordonnée par le président américain George Bush.

L'ancien dictateur de ce pays d'Amérique centrale avait ensuite été condamné à 40 ans de prison aux États-Unis pour trafic de drogue. Placé en détention en Floride, sa peine avait été réduite à 17 ans pour bonne conduite.

Mais quelques jours avant la date prévue pour sa libération, en septembre 2007, un juge fédéral américain a approuvé son extradition vers Paris. Et la Cour suprême des États-Unis a refusé le 22 mars son ultime recours.

Le gouvernement panaméen a fait savoir qu'il respectait la décision «souveraine» des États-Unis, tout en demandant que l'ancien dictateur soit rapatrié pour être aussi jugé dans son pays.

Le général Noriega a été condamné au Panama à 54 ans de prison pour son implication dans la disparition et le meurtre d'opposants entre 1968 et 1989.