Le jour où elle a appris que le duo qu'elle forme avec la chanteuse juive Noa allait représenter Israël au concours Eurovision 2009, Mira Awad était rivée à son écran de télévision, en train de suivre l'offensive israélienne dans la bande de Gaza.

Cette Arabe israélienne était atterrée en voyant les bombes tomber sur Gaza. Mais cela ne l'a pas empêchée de joindre sa voix à celle de Noa pour chanter There Must Be Another Way, la chanson pacifiste qu'elles présentent à la finale du concours de chanson européenne qui se tient aujourd'hui à Moscou.

 

«La peine n'a pas une seule adresse, je pleure pour nous deux», chanteront les deux artistes sur l'estrade moscovite où elles portent les couleurs de l'État hébreu.

Noa s'appelle en vérité Achinoam Nini. C'est une Juive israélienne originaire du Yémen. Mira Awad est une Arabe israélienne chrétienne, originaire de Galilée.

Dénoncer un conflit

Les deux femmes ont uni leurs voix pour dénoncer un conflit en apparence de plus en plus insoluble, entre deux peuples qui, pourtant, se ressemblent.

«Mira a la peau claire et les yeux verts et elle est Arabe, moi, j'ai la peau et les yeux sombres et je suis une Juive israélienne, même notre apparence prête à confusion», dit Noa dans une entrevue diffusée sur YouTube. «Tout est comme ça, ajoute-t-elle en montrant ses doigts entremêlés. Mira et moi, nous sommes pareilles.»

Mais pareilles ou pas, les deux femmes ont suscité des réactions, de part et d'autre de la ligne ethnique qui les sépare.

Pour les Palestiniens, le duo qui représente Israël aujourd'hui à Moscou n'est qu'un paravent servant à donner une meilleure image d'Israël.

«Chaque brique dans le mur de cette image truquée permet à l'armée israélienne de lancer 10 nouvelles tonnes d'explosifs et de bombes au phosphore», dénoncent les signataires d'une pétition qui demandent à Mira Awad de se retirer du concours.

Noa se trouve aussi entre deux feux. Ses prestations à l'étranger attirent dorénavant des manifestants anti-israéliens. Mais cela ne la rend pas plus présentable auprès de la droite israélienne, qui la qualifie de «cinquième colonne au sein de l'État».

La minorité arabe représente 20% de la population israélienne. Pourtant, Israël n'avait encore jamais envoyé de chanteur arabe au concours Eurovision, où il a déjà été représenté par un transsexuel, et par un Juif noir.

Les deux chanteuses ne se font pas d'illusions: «Nous savons que notre duo n'apportera pas la paix», disent-elles. Mais elles espèrent que leurs chansons contribueront à encourager ceux qui croient que la paix est possible.