Ségolène Royal, Martine Aubry et Bertrand Delanoë: deux femmes et un homme comptent leur influence jeudi lors d'un vote des militants du Parti socialiste sur leurs projets, à dix jours d'un congrès qui doit désigner le nouveau chef de l'opposition française.

Désorientés par une guerre des chefs qui mine leur parti et laisse le champ libre au président de droite Nicolas Sarkozy, les militants reprennent la parole pour trancher le rapport de forces entre courants: sur quelque 233 000 adhérents, entre 130 000 et 140 000 votants doivent s'exprimer à bulletin secret dans leur section.

Aucun de ces trois quinquagénaires expérimentés ne semblant se détacher, la compétition va se jouer dans un mouchoir de poche et chacun peut prétendre à un tiers environ des suffrages, selon les pronostics. L'arbitre pourrait être le jeune représentant de l'aile gauche, Benoît Hamon.

Si aucun des projets n'obtient 50% des suffrages exprimés, la porte sera ouverte à d'improbables alliances entre les trois «présidentiables» qui se vouent une animosité certaine.

Un scénario «possible» selon le premier secrétaire sortant François Hollande, qui a cherché à le conjurer en souhaitant qu'»on se dispense de ce type de conciliabules, de surenchère ou de partie de cartes».

Le quotidien Libération notait que les prémices d'un renouveau au PS sont rendues «invisibles» par une «couche d'ambitions personnelles non assumées, de calculs, d'hypocrisie florentine et d'alliances déroutantes».

«Nous savons ce que donnent les combinaisons et les préoccupations exagérément tactiques» et «s'il n'y a pas de clarté, nous échouerons», a averti mercredi Bertrand Delanoë.

Ce dernier est, selon les sondages, le favori de la compétition. Le maire de Paris, 57 ans, est soutenu par le premier secrétaire sortant et par l'ex-Premier ministre Lionel Jospin.

Toutefois, son positionnement «libéral et socialiste» exprimé au printemps semble lui revenir comme un boomerang depuis la crise financière internationale qui par ailleurs a fourni à Ségolène Royal les arguments pour «gauchir» son discours.

L'ex-candidate à la présidentielle, 55 ans, n'est pas soutenue par les cadres du parti qui lui reprochent notamment son désir de se rapprocher des centristes. Mercredi soir, elle demandé aux militants d'être «les ouvriers de la profonde transformation» du PS.

Quant à Martine Aubry, 58 ans, elle se dit «extrêmement sereine» et refuse toute «dramatisation».

L'ex-ministre du Travail qui, à la fin des années 1990, avait élaboré le projet de semaine des 35 heures, aujourd'hui remis en cause par la droite, fédère désormais les partisans de l'ancien Premier ministre Laurent Fabius et une partie de ceux de l'ancien ministre des Finances Dominique Strauss-Kahn, devenu directeur général du Fonds monétaire international (FMI).

Après le vote sur les projets, dont le résultat devait être connu dans la nuit de jeudi à vendredi, le PS tient les 15 et 16 novembre son congrès à Reims (nord-est) où les candidats à la direction vont se déclarer et les éventuelles alliances se former. L'élection se fera le 20 novembre par un vote de tous les militants.

Le successeur de François Hollande aura la lourde tâche de redresser une formation qui a essuyé trois défaites successives à la présidentielle depuis 1995, dans la perspective de celle de 2012.

S'il a remporté les municipales de mars, le PS n'apparaît pas encore comme porteur d'un projet d'alternative crédible à Nicolas Sarkozy, laissant le terrain de l'opposition au trotskiste Olivier Besancenot et au centriste François Bayrou.

«La course vers nulle part est lancée au PS», a ironisé l'UMP, le parti de Nicolas Sarkozy.