(New York) Mégaphone rouge et blanc à la main, lunettes noires sur le nez, Laura Loomer harangue les « bêtes de foire médiatiques » – sa formule pour décrire les journalistes qui l’entourent à l’extérieur du tribunal où doit s’ouvrir le procès de Donald Trump, en ce lundi de la mi-mars.

L’influenceuse d’extrême droite promet de revenir au même endroit chaque jour du procès pour répéter le même message qui orne son t-shirt, et ce, jusqu’à ce que les « “faux médias” publient la vérité ».

« Donald Trump n’a rien fait de mal », martèle-t-elle.

La pasionaria trumpiste enchaîne en accusant entre autres la femme de Juan Merchan, le juge chargé du procès, de travailler « littéralement » pour la procureure générale de l’État de New York, Letitia James.

« Dites-moi que ce n’est pas une chasse aux sorcières. En quoi cela est-il juste pour Donald Trump ? », demande-t-elle.

Durant l’heure du dîner, Donald Trump publiera sur Truth Social une vidéo de la scène. Des analystes se demanderont aussitôt s’il vient de violer une autre fois l’ordonnance de bâillon que lui a imposée le juge Merchan et qui lui interdit notamment de s’attaquer aux membres de la famille du magistrat.

Cette ordonnance sera au cœur d’une audience qui doit se dérouler devant le juge Merchan mardi, au lendemain des déclarations d’ouverture du procès de Donald Trump. Elle est assortie d’une amende et d’une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à 30 jours.

Et son élargissement, le 1er avril dernier, est dû en bonne partie à Laura Loomer, dont la présence dans l’orbite de Donald Trump inquiète certains de ses conseillers. Qui est-elle au juste ?

« Fière islamophobe »

Née il y a 30 ans dans une famille juive de Floride, cette protégée de Roger Stone, confident de longue date de Donald Trump, s’est déjà décrite comme une « fière islamophobe ». En juillet 2017, elle s’est ainsi réjouie sur Twitter de la noyade de plus de 2000 migrants, pour la plupart musulmans, qui tentaient de traverser la Méditerranée.

Quelques mois plus tard, elle a tenu sur le même réseau social des propos sur les chauffeurs musulmans qui lui ont valu d’être bannie à vie des services de covoiturage Uber et Lyft. PayPal, Venmo, Facebook et Twitter l’ont également déclarée persona non grata.

Réintégrée par X, successeur de Twitter, Laura Loomer a renoncé à son étiquette d’islamophobe. Mais elle n’a pas renié ses accointances avec le nationalisme blanc. « Oui, je suis pour le nationalisme blanc », a-t-elle déclaré lors d’une balado diffusée en 2017.

Mais il y a une différence entre le nationalisme blanc et le suprémacisme blanc, n’est-ce pas ? Et beaucoup de libéraux et de juifs marxistes mondialistes de gauche ne le comprennent pas. Ce pays a été construit comme un ethno-État judéo-chrétien blanc, essentiellement. Avec le temps, l’immigration et tous ces appels à la diversité commencent à détruire ce pays.

Laura Loomer

Le New York Times a ressorti cette déclaration en avril 2023 dans un article portant sur la volonté de Donald Trump de confier à Laura Loomer un rôle officiel dans sa campagne présidentielle. Ce projet d’embauche a été bloqué par la codirectrice de la campagne, selon le site Axios.

Mais Donald Trump a continué à s’appuyer sur Laura Loomer, rediffusant sur Truth Social ses vidéos et messages incessants attaquant ses cibles préférées, de Ron DeSantis à Nikki Haley en passant par les migrants.

PHOTO NICOLE CRAINE, ARCHIVES THE NEW YORK TIMES

Laura Loomer, devant la prison du comté de Fulton en Géorgie, le 24 août 2023

En août 2023, il a cimenté sa relation avec l’adepte de la théorie complotiste du grand remplacement en l’accueillant dans son club de golf de Bedminster, au New Jersey. « Tu travailles dur et tu es une femme d’opinion, je dois te le dire, et j’aime cela », a-t-il déclaré à son invitée, qui n’a pas manqué de diffuser la vidéo de sa rencontre avec Donald Trump sur X.

Lors d’un rassemblement tenu à la veille des caucus de l’Iowa, en janvier dernier, Donald Trump en a remis une couche en signalant la présence de Laura Loomer parmi les dignitaires présents.

« Vous la voulez de votre côté », a-t-il lancé.

De son côté

Et Laura Loomer se trouve encore du côté de Donald Trump dans sa bataille judiciaire à New York. Elle a ainsi épaulé le prévenu dans ses efforts pour remettre en cause l’impartialité du juge Merchan. Elle a pris ce dernier par la bande, accusant sa fille, Loren Merchan, une consultante démocrate, d’avoir publié sur son compte X une image montrant l’ancien président derrière les barreaux. La cour a conclu qu’il s’agissait d’un compte attribué faussement à Loren Merchan.

PHOTO SETH WENIG, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Le juge Juan Merchan

Donald Trump a néanmoins relayé l’allégation de Laura Loomer sur Truth Social, poussant le juge Merchan à étendre son ordonnance de bâillon. Depuis le 1er avril, l’ancien président se voit interdire non seulement de s’en prendre aux témoins, aux jurés et aux procureurs impliqués dans son procès, mais également aux membres de la famille du juge et du procureur de Manhattan, Alvin Bragg.

Lors de l’audience de mardi, ses avocats devront convaincre le juge Merchan qu’il n’a pas violé sciemment son ordonnance de bâillon dans au moins dix cas détaillés par le bureau du procureur de Manhattan.

Mais Donald Trump ne devrait pas craindre d’être envoyé en prison, selon Laura Loomer. Dans un message publié sur X la semaine dernière, l’agitatrice a en fait encouragé l’ancien président à défier le juge et à s’absenter de son procès jeudi afin d’assister à l’audition de son appel devant la Cour suprême sur la question de son immunité pénale.

« Je veux qu’ils arrêtent Donald Trump pour que nous puissions le voir collecter 100 millions de dollars du jour au lendemain et remporter l’élection haut la main », a-t-elle écrit sur X.

En novembre 2023, la même femme a déclaré qu’elle accepterait volontiers de servir de porte-parole de la présidence après le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche.