(Washington) Voici quatre ans, les pressions de l’ancien président Donald Trump sur l’Ukraine pour obtenir des informations potentiellement compromettantes concernant son rival Joe Biden lui ont valu un procès en destitution.  

Aujourd’hui, à partir des mêmes soupçons diffus, la droite américaine a engagé une procédure similaire contre Joe Biden, successeur de Donald Trump à la Maison-Blanche.

La demande d’enquête en destitution formulée mardi par le président républicain de la Chambre des représentants, Kevin McCarthy, a priori vouée à l’échec puisque les démocrates sont majoritaires au Sénat, fait suite à des récriminations répétées de Donald Trump.

« Les républicains au Congrès, qui veulent bien faire, passent leur temps à parler d’une enquête en destitution contre Joe Biden-la-Crapule », soupirait-il fin août sur son réseau Truth Social. « Biden est une pure crapule, il n’y a pas besoin d’une longue enquête pour le prouver, c’est déjà prouvé », affirmait-il.

L’ancien président voyait une procédure en destitution contre son successeur comme un juste retour de bâton. « Ils nous l’ont fait à nous ! », concluait-il en référence aux deux procès en destitution qui ont abouti à son acquittement, en 2020 et 2021, le Sénat étant alors contrôlé par les républicains.

Le 25 juillet 2019, lors d’un échange téléphonique controversé – le premier d’une série d’appels, qualifiés de « parfaits » par Donald Trump – il demandait au président ukrainien Volodymyr Zelensky une enquête dans son pays sur Joe Biden, son probable adversaire à la présidentielle de novembre 2020, et sur le groupe gazier ukrainien Burisma.

Ses soupçons se concentraient sur Burisma car le fils de Joe Biden, Hunter Biden, avait siégé plusieurs années au conseil d’administration du groupe, moyennant de généreuses rémunérations, alors que M. Biden était vice-président de Barack Obama (2009-2017) et supervisait la politique américaine en Ukraine.

Dès 2018, Donald Trump avait dépêché en Ukraine son avocat personnel, Rudy Giuliani, afin d’y dénicher des informations susceptibles d’embarrasser Joe Biden, court-circuitant et dénigrant l’ambassadrice américaine à Kyiv, Marie Yovanovitch, finalement rappelée brutalement à Washington en 2019.

Procureur ukrainien limogé

Fait aggravant : l’appel téléphonique du 25 juillet 2019 coïncidait avec le gel du versement d’une aide militaire de 400 millions de dollars à l’Ukraine, conférant à la demande du président républicain une possible dimension de chantage.  

Le 24 septembre 2019, la prédécesseuse démocrate de Kevin McCarthy, Nancy Pelosi, lançait la première procédure en destitution contre lui.

Mais le parallèle s’arrête là : contrairement à la discussion téléphonique devant témoins entre MM. Trump et Zelensky, les agissements potentiellement répréhensibles de Hunter Biden, voire de son père, restent à établir.

Les parlementaires conservateurs reprochent à Hunter Biden d’avoir fait des affaires douteuses en Ukraine et en Chine en tirant profit des réseaux et du nom de son père.

Mais ils vont encore plus loin, en s’interrogeant sur de possibles motivations inavouables aux pressions exercées sur Kyiv par Joe Biden en tant que vice-président pour obtenir le limogeage du procureur général Viktor Chokine.

L’éviction du procureur en 2016 faisait suite à des efforts coordonnés des États-Unis avec l’Union européenne et le Fonds monétaire international (FMI), qui l’accusaient de couvrir la corruption et de saboter les réformes du gouvernement.

Dans une lettre au département d’État datée de mardi, l’élu républicain dirigeant la commission d’audit de la Chambre des représentants, James Comer, demande à la diplomatie américaine des explications sur son « soudain changement d’attitude » en 2015 envers M. Chokine et ses services.

Donald Trump et ses alliés ont souvent affirmé, sans fournir ni preuve ni motif plausible, que le procureur avait été écarté en raison de la menace qu’il aurait représentée pour Hunter Biden.

Le fils du président est actuellement poursuivi pour fraude fiscale et pour acquisition d’une arme à feu alors qu’il était toxicomane, mais n’a pas été inquiété par la justice pour ses activités à l’étranger.