(Washington) Les manifestants opposés aux mesures sanitaires au Canada se sont tournés vers un site chrétien de financement après le gel de leur campagne de soutien par GoFundMe, une décision dénoncée par Donald Trump et d'autres personnalités publiques américains qui accusent le site de financement participatif de « pratiques trompeuses ».

Baptisé « Convoi de la liberté », ce mouvement bloque le centre de la capitale Ottawa avec des poids lourds depuis le 29 janvier.

Initié par les chauffeurs routiers qui dénonçaient l’obligation vaccinale pour traverser la frontière avec les États-Unis, le mouvement a fait tache d’huile dans le pays en se transformant en protestation contre les mesures sanitaires dans leur ensemble et, pour certains manifestants, contre le gouvernement de Justin Trudeau.

Ouverte fin janvier sur GoFundMe, une cagnotte de soutien a reçu plus de 10 millions de dollars canadiens. Mais la plateforme a retiré vendredi la cagnotte au motif qu’elle violait ses conditions d’utilisation.

Elle a alors précisé que les donateurs pouvaient demander un remboursement et que les fonds restants seraient redistribués à des organisations caritatives de son choix.

« Nous avons des preuves que la manifestation jusqu’ici pacifique est devenue une occupation, la police signalant des violences et d’autres activités illégales », a expliqué le site dans un communiqué.

Le maire d’Ottawa, Jim Watson, a salué la décision de GoFundMe mais elle a fait bondir plusieurs responsables politiques américains partisans des camionneurs canadiens.

L’ex-président Donald Trump a condamné l’annulation d’un compte Facebook aux États-Unis en soutien aux manifestants et le gel de la campagne de dons par GoFundMe.

« C’est inacceptable et extrêmement dangereux dans n’importe quel pays qui attache de l’importance à la libre expression », a-t-il dit dans un communiqué.

« C’est du vol », a lancé dimanche sur Fox News le sénateur républicain du Texas Ted Cruz, lui-même né au Canada, qualifiant les manifestants de « héros » et de « patriotes » qui « défendent le Canada et les États-Unis ».

Il a annoncé avoir demandé à la Commission fédérale chargée du Commerce d’enquêter sur d’éventuelles « pratiques trompeuses » de GoFundMe.

Et plusieurs États conservateurs comme la Virginie-Occidentale, la Floride et le Texas ont menacé d’ouvrir des enquêtes judiciaires contre le site, estimant qu’il n’avait pas le droit de rediriger les fonds à sa guise.

« Deux poids deux mesures »

Elon Musk, fondateur de Tesla et SpaceX, a pour sa part fustigé le « deux poids deux mesures » de GoFundMe.

Dans un tweet, il a rappelé qu’à l’été 2020, le site avait autorisé une campagne de financement en faveur des manifestants antiracistes qui avaient transformé le centre de Seattle en « zone autonome », une occupation émaillée de violences.

Pour mettre fin à la polémique et échapper à des poursuites, GoFundMe a annoncé samedi que tous les donateurs de la campagne seraient automatiquement remboursés.

Les camionneurs, eux, ont lancé une nouvelle campagne de fonds via le site chrétien GiveSendGo, qui avait déjà récolté lundi plus de 4,8 millions de dollars.

Le gel d’une collecte de fonds par GoFundme n’est pas une première.  

L’année dernière, le site avait bloqué une campagne pour financer la défense d’un jeune Américain blanc, Kyle Rittenhouse, inculpé pour avoir abattu deux hommes lors d’une manifestation antiraciste en 2020, expliquant que le site interdisait les dons pour payer les frais d’avocats dans les affaires de crimes violents.

La campagne avait pu reprendre après l’acquittement du jeune homme.

Des services de paiement en ligne ont également privé des organisations de fonds pour avoir violé leurs conditions d’utilisation.

En 2010, Paypal ainsi que plusieurs banques avaient bloqué les fonds du site internet WikiLeaks, devenu la bête noire de Washington après la diffusion de télégrammes diplomatiques confidentiels américains qui avait provoqué un scandale mondial.

Plus récemment, la plateforme de paiement en ligne Stripe a fermé en 2018 le compte du groupuscule d’extrême droite français Génération identitaire, estimant qu’il encourageait la violence contre les étrangers.