(Washington) Les États-Unis ont annoncé lundi de « dures » sanctions contre le Guide suprême iranien, l’ayatollah Ali Khamenei, et plusieurs hauts gradés des Gardiens de la Révolution, frappant la tête de la République islamique pour faire encore monter la pression sur Téhéran.

L’Iran a rétorqué en appelant Washington à arrêter son « aventurisme militaire » et sa « guerre économique », en jugeant que le « climat » n’était pas propice à des discussions avec les États-Unis.

Le président américain Donald Trump, qui accuse l’Iran de chercher à se doter de l’arme nucléaire et d’être un « parrain du terrorisme », a signé un décret empêchant « le Guide suprême, son équipe et d’autres qui lui sont étroitement liés d’avoir accès à des ressources financières essentielles ».

Egalement visé, le ministre iranien des Affaires étrangères Mohammad Javad Zarif, visage de la politique iranienne de détente avec l’Occident, considéré comme un modéré et abhorré des ultraconservateurs.

Il sera placé sur la liste des sanctions « plus tard cette semaine », a indiqué le secrétaire américain au Trésor Steven Mnuchin, annonçant également que Washington allait geler des « milliards de dollars » d’actifs iraniens supplémentaires, sans autre précision.

Huit hauts gradés des Gardiens de la Révolution, l’armée idéologique du régime, ont aussi été sanctionnés, quatre jours après la destruction d’un drone américain par un missile iranien dans la région stratégique du Golfe.

En plus de ces dernières mesures, M. Trump, ont affirmé samedi des médias américains, a autorisé secrètement des cyberattaques contre des systèmes de lancement de missiles et un réseau d’espionnage iraniens, en riposte à la destruction du drone. Téhéran a affirmé n’avoir subi aucun dégât.

Risque d’embrasement

Washington et Téhéran, qui n’ont plus de relations diplomatiques depuis 1980, sont engagés dans un nouvel accès de fièvre qui fait craindre un embrasement.

Donald Trump a dit avoir annulé in extremis des frappes de représailles, prévues vendredi, contre des cibles iraniennes.

Le Conseil de sécurité de l’ONU, qui a tenu lundi une réunion à huis clos sur l’Iran à la demande de Washington, a appelé dans une déclaration « au dialogue » et à la fin des tensions.

« Pour atténuer les tensions dans l’ensemble de la région du Golfe, les États-Unis doivent arrêter leur aventurisme militaire, comme leur guerre économique et le terrorisme contre le peuple iranien », a lancé lundi l’ambassadeur iranien à l’ONU Majid Takht Ravanchi.

A Téhéran, Mohammad Javad Zarif a de son côté tweeté que l’armée américaine n’avait « rien à faire dans le Golfe ».

Dans ce contexte ultra tendu, le président français Emmanuel Macron a annoncé qu’il rencontrerait « en aparté » Donald Trump pour évoquer le dossier iranien en marge du sommet G20 en fin de semaine au Japon.

Et dans un communiqué commun, au moment où le secrétaire d’État américain Mike Pompeo effectue une visite aux Émirats et en Arabie saoudite, deux alliés de Washington et grands rivaux de Téhéran, les États-Unis, le Royaume-Uni, l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis ont exhorté à trouver des « solutions diplomatiques » pour faire baisser les tensions actuelles.

Detroit stratégique

Le président américain avait plus tôt appelé les pays importateurs de pétrole à protéger leurs propres cargaisons dans le détroit d’Ormuz, un point de passage clé pour le commerce mondial de pétrole situé dans la zone où l’Iran a abattu le drone américain et où des attaques ont ciblé des pétroliers ces dernières semaines.

« Nous n’avons même pas besoin d’être sur place dans la mesure où les États-Unis sont désormais (de loin) le premier producteur d’énergie au monde ! », a-t-il avancé, en appelant les autres pays importateurs de pétrole à monter en première ligne.

« 91 % des importations chinoises de pétrole passent par le détroit d’Ormuz, 62 % pour le Japon, et c’est pareil pour nombre d’autres pays », a dit le milliardaire républicain. « Pourquoi protégeons-nous ces voies de navigation (depuis de longues années) pour d’autres pays sans la moindre compensation ? ».

« Tous ces pays devraient protéger leurs propres navires dans ce qui a toujours été un passage dangereux », a-t-il encore tweeté.

L’administration Trump s’est retirée en mai 2018 de l’accord nucléaire censé limiter les activités sensibles de l’Iran, et considéré par les Européens, les Russes et les Chinois-toujours parties à l’accord-comme le meilleur moyen de s’assurer que l’Iran n’aura pas la bombe.

Les États-Unis ont ensuite rétabli à partir d’août 2018 une série de sanctions économiques contre Téhéran dans le cadre d’une campagne de « pression maximale » contre l’Iran, accusé également de déstabiliser la région.

De nouvelles frictions sont à prévoir avec l’annonce par l’Iran que ses réserves d’uranium enrichi dépasseront à partir du 27 juin la limite prévue par l’accord nucléaire.