Un important commandant rebelle a annoncé samedi que Donetsk, place forte des insurgés dans l'est de l'Ukraine, était encerclée par les forces nationales, et que les combattants séparatistes étaient prêts à accepter un cessez-le-feu dans le but d'éviter une catastrophe humanitaire.

Il n'y a pas eu de réponse immédiate du gouvernement à cette déclaration d'Alexander Zakharchenko, le soi-disant premier ministre des séparatistes de Donetsk.

La Russie fait pression pour l'envoi d'une mission humanitaire à Lougansk, mais Kiev et plusieurs pays occidentaux soupçonnent que cela pourrait représenter un prétexte pour y dépêcher des troupes. Des chancelleries occidentales avancent que la Russie a massé quelque 20 000 soldats de l'autre côté de la frontière.

Ces commentaires du chef rebelle pourraient viser à tenter de convaincre la communauté internationale d'accepter une mission humanitaire russe.

Le président ukrainien, Petro Porochenko, a émis un communiqué tard samedi dans lequel il mentionne que l'Ukraine est prête à accepter une mission humanitaire dans l'est du pays. Il a toutefois ajouté que l'aide devait venir sans accompagnement militaire, que la mission devra passer un poste frontalier sous contrôle ukrainien et que la mission devra avoir un caractère international.

M. Porochenko a expliqué qu'il avait eu des discussions avec la chancelière allemande Angela Merkel entourant la participation de l'Allemagne à ce type de mission.

Du côté de Washington, la Maison-Blanche a indiqué que le président Barack Obama et Mme Merkel avaient conclu que toute intervention russe en Ukraine était inacceptable et violerait le droit international.

Les conditions à Donetsk, la plus grande ville rebelle, se détérioraient clairement samedi. Le grondement de l'artillerie se répercutait entre les bâtiments tandis que les rues de la ville, qui abritait autrefois un million de personnes, étaient vides de piétons et de voitures. La plupart des commerces étaient fermés.

Au moins une personne a été tuée et 18 autres blessés dans des bombardements, samedi, qui ont touché quelque 30 immeubles résidentiels, a indiqué un porte-parole municipal. «La situation empire d'heure en heure», a-t-il confié à l'Associated Press, précisant que près de 2000 bâtiments résidentiels étaient privés d'électricité. Des explosions pouvaient aussi être entendues samedi dans les faubourgs nord, près de l'aéroport.

Kiev a constamment nié avoir bombardé des cibles civiles, mais les rebelles rejettent cette affirmation et soutiennent que l'État cherche à blâmer les insurgés pour le nombre croissant de morts et les destructions qui se multiplient.

La déclaration de M. Zakharchenko voulant que la ville soit encerclée survient quelques heures après que le principal commandant rebelle eut indiqué que les forces ukrainiennes s'étaient emparées de Krasnyi Luch, et auraient effectivement isolé Donetsk des autres zones sous contrôle rebelle.

«Le groupe de combattants Donetsk-Horlivka de la Nouvelle Russie est entièrement encerclé», a-t-il indiqué sur une page gérée par les rebelles sur les réseaux sociaux. Les termes «Nouvelle Russie» sont largement utilisés par les rebelles de l'est de l'Ukraine qui réclament l'indépendance. Korlivka, où des combats ont également lieu, est située à 30 kilomètres de Donetsk.

Les inquiétudes sont de plus en plus nombreuses face à la situation humanitaire à Lougansk, où les combats ont été plus intenses et durent depuis plus longtemps. Une carte publiée par l'armée ukrainienne montre les forces nationales entourant la ville sur trois fronts, avec une seule ouverture au sud.

Des agences de presse russes, citant des autorités municipales, ont mentionné samedi que la ville se trouvait sans eau et sans électricité depuis une semaine, et que la majorité des commerces étaient fermés.

De son côté, la Croix-Rouge a fait état de l'accroissement de ses efforts pour lutter contre la crise dans l'est de l'Ukraine, mais a mis en garde que tout convoi de l'organisation «respectera strictement [ses] principes fondamentaux que sont la neutralité, l'impartialité et l'indépendance».

Samedi, le directeur adjoint de l'administration présidentielle ukrainienne a affirmé que les forces russes voulaient entrer en Ukraine sous prétexte d'une mission humanitaire, mais que Kiev avait bloqué cette démarche. Un porte-parole du Kremlin a rejeté cette allégation, affirmant qu'«il n'y a pas eu de tentative de pénétration de la part des soldats russes», selon les agences russes. Il a toutefois réitéré l'appel de Moscou pour une démarche de nature humanitaire, affirmant que «cette catastrophe est désormais le principal sujet de discussion».

La Maison-Blanche a indiqué que le président Porochenko avait expliqué ses discussions avec la Croix-Rouge au vice-président américain Joe Biden en ce qui concerne une mission humanitaire.

Un communiqué émis par la Maison-Blanche souligne que M. Biden et M. Porochenko ont conclu que si «la Russie est sérieuse en ce qui concerne l'amélioration des conditions humanitaires dans l'est de l'Ukraine», elle devrait immédiatement cesser de nuire aux efforts des troupes ukrainiennes, libérer les otages ukrainiens retenus en Russie et arrêter de fournir en armes les séparatistes prorusses en Ukraine.

À Kiev, des travailleurs municipaux et des bénévoles ont démonté samedi les dernières barricades ayant bloqué la principale artère depuis le début des manifestations antigouvernementales, en novembre. Les protestataires les avaient érigées pour protéger un village de tentes sur la principale place de la ville. Bien que la taille du camp en question ait rapidement diminué après la fuite du président prorusse Viktor Ianoukovitch en février, et l'installation d'un nouveau gouvernement, un petit noyau d'irréductibles était demeuré sur place.