Soucieux d'éviter de se déchirer sur la reconnaissance d'un État palestinien, les ministres européens des Affaires étrangères ont exploré vendredi à Sopot (Pologne) les moyens d'élaborer une position commune d'ici à la prochaine assemblée générale de l'ONU.

Le temps est compté. L'assemblée s'ouvre le 13 septembre à New York, et les Palestiniens, face à l'impasse dans laquelle se trouvent les pourparlers avec Israël, ont annoncé qu'ils préparaient une telle demande.

Le projet de résolution n'est pas encore finalisé, mais les Palestiniens pourraient demander une adhésion à part entière de leur État à l'ONU et la reconnaissance de la Palestine sur les lignes du 4 juin 1967, avant la Guerre des Six Jours (soit la Cisjordanie, la bande de Gaza et Jérusalem-Est).

Alors que les Palestiniens espèrent pouvoir compter sur le soutien de 150 des 193 États de l'ONU, les États-Unis ont menacé d'y mettre leur veto au Conseil de sécurité, chargé de valider une demande d'adhésion à l'ONU.

Premier partenaire économique d'Israël et premier fournisseur d'aide aux Palestiniens, l'Europe doit être «capable de continuer à jouer le rôle positif qu'elle a pu jouer au Moyen-Orient (...) et la clé pour cela c'est l'unité», a jugé à Sopot le chef de la diplomatie belge, Steven Vanackere.

«Nous sommes partenaires, et nous voulons devenir acteurs. Mais pour devenir acteurs, nous devons avoir une position commune», a jugé son homologue polonais Radoslaw Sikorski, dont le pays préside l'UE.

Le Français Alain Juppé a dit redouter une confrontation diplomatique «stérile et dangereuse» à l'ONU, plaidant lui aussi pour que les 27 définissent une position commune.

Ce n'est pas gagné. Ces derniers mois, Berlin et Rome ont critiqué la démarche palestinienne, alors que Madrid l'a soutenue. Londres et Paris ont gardé leur option ouverte.

Vendredi à Sopot, le Néerlandais Uri Rosenthal a réitéré être «totalement opposé à de quelconques démarches unilatérales, quelles qu'elles soient», alors qu'Israël a menacé les Palestiniens de mesures de rétorsion s'ils déposaient une telle demande. L'Allemand Guido Westerwelle a lui aussi fait état de son opposition à une démarche «unilatérale».

À l'inverse, le Luxembourgeois Jean Asselborn a estimé qu'on ne pouvait «pas ne rien donner aux Palestiniens», plaidant en faveur d'une solution «médiane», qui puisse donner «de la dignité» au peuple palestinien.

La Palestine pourrait par exemple devenir un État non-membre doté du statut d'observateur, à l'instar du Vatican. «Les Palestiniens auraient ainsi diverses possibilités pour être mieux intégrés dans les organisations de l'ONU», a fait valoir M. Asselborn.

Cette formule --s'ils obtenaient l'approbation des deux tiers des États membres de l'Assemblée-- leur permettrait en effet de devenir membre à part entière de toutes les agences de l'ONU, comme l'OMS (Organisation mondiale de la santé), l'UNESCO, ou l'Unicef.

Cherchant à temporiser, le chef de la diplomatie européenne Catherine Ashton, qui revient d'une tournée au Proche-Orient, a souligné qu'il n'y avait «pas encore de texte à propos duquel nous devrions prendre position».

«Les Palestiniens devront décider quelle résolution ils entendent soumettre» à l'ONU, a-t-elle relevé.

L'espoir des Européens est que les Palestiniens acceptent de ne pas placer la barre trop haut, explique un diplomate sous couvert d'anonymat.

Selon lui, l'UE pourrait adopter une démarche «pro-active» en proposant elle-même aux Palestiniens des formulations acceptables par le plus grand nombre pour leur résolution.

S'ils refusent, «nous pourrions aussi les menacer de soumettre notre propre résolution» sur la question, juge-t-il.

D'ici là, «nous nous sommes mis d'accord pour ne pas émettre de conjectures en public, car cela desservirait l'objectif final», a annoncé Radoslaw Sikorski.