Le gouverneur du Missouri a appelé au calme lundi dans l'attente de savoir si un policier blanc qui a abattu un jeune Noir désarmé sera inculpé.

À deux heures de la décision du grand jury du Missouri, attendue à 20h locales, la population de Ferguson s'était massée sur les trottoirs de cette banlieue de St-Louis secouée en août par de graves émeutes raciales, après la mort de Michael Brown.

Le gouverneur Jay Nixon a exhorté les Américains "de tous côtés à faire preuve de tolérance, respect mutuel et retenue, quelle que soit la décision".

Les forces de l'ordre craignent de nouvelles manifestations violentes et se préparent à toute éventualité depuis plusieurs jours.

Le gouverneur, qui avait décrété l'état d'urgence, mobilisé la garde nationale et renforcé les effectifs de police, a prévenu que les forces de l'ordre auraient recours à tous les moyens disponibles "si les gens sont violents ou menacent la propriété privée".

Le risque est grand tant la mort du jeune homme avait réveillé le spectre du racisme aux Etats-Unis et éclairé de manière très crue les relations très tendue dans cette ville à majorité noire où policiers et édiles sont quasiment tous blancs.

Le jeune homme de 18 ans --qui n'était pas armé-- a été tué par Darren Wilson en plein jour dans une rue de Ferguson le 9 août d'au moins six balles.

Le corps du jeune homme avait été laissé à la vue des passants pendant plusieurs heures, en plein soleil, ajoutant à la colère des manifestants qui y ont vu un signe de plus du mépris des forces de l'ordre pour la population noire.

Une vingtaine de minutes avant cette confrontation, Michael Brown avait été filmé dans une supérette en train de voler une boîte de cigares.

Depuis près de trois mois, les 12 membres du grand jury se sont réunis à huis clos pour déterminer s'il y a lieu ou non d'inculper et poursuivre le policier de 28 ans.

La famille du jeune Noir a appelé à respecter quatre minutes de silence après l'annonce du grand jury, pour marquer les quatre heures pendant lesquelles le corps de leur fils était resté dans la rue.

"Nous ne sommes pas ici pour être violents, nous sommes ici en mémoire de notre fils. Nous sommes ici pour la protection de tous les enfants", ont souligné des membres de la famille Brown.

"Nous avons pris la parole pour faire en sorte que Noirs et Métis puissent vivre dans ce pays sans être discriminés à cause de la couleur de leur peau".

La mort de Michael Brown avait ravivé les tensions raciales et provoqué des émeutes au point qu'un couvre-feu avait été imposé plusieurs jours à Ferguson.

Selon les médias, le policier a déclaré devant le grand jury avoir agi en légitime défense après une empoignade avec Michael Brown. Mais des témoins ont assuré que le jeune homme avait les mains en l'air lorsqu'il a été tué.

Le grand jury, composé de neuf Blancs et trois Noirs, peut avoir décidé d'inculper le policier d'assassinat, de meurtre ou d'homicide involontaire, ou au contraire de ne pas le poursuivre du tout.

Dans cette hypothèse, les autorités craignent de nouvelles émeutes s'il devait échapper à un procès.

Les appels à la retenue et à des manifestations pacifiques se sont multipliés depuis vendredi émanant notamment du président Barack Obama, du ministre de la Justice Eric Holder, également noir, et de responsables locaux, ainsi que des parents de Michael Brown et de responsables religieux.

Le tribunal de Clayton, où le grand jury a siégé et qui se trouve à une vingtaine de minutes de Ferguson, est protégé depuis ce week-end par des barrières métalliques et de gros plots de plastique orange.

De nombreux commerçants et entreprises de Ferguson ont placardé leurs devantures avec de grands panneaux de bois et plusieurs écoles ont avancé le long week-end de la fête de Thanksgiving jeudi en fermant leurs portes toute cette semaine.

"Il va y avoir la guerre. Dès aujourd'hui. La guerre!", criait lundi soir un habitant de Ferguson non loin de l'endroit où la fusillade a eu lieu.

L'homme, qui préférait garder l'anonymat, s'est dit convaincu que le policier serait blanchi. "En déployant la Garde nationale, vous envoyez une véritable déclaration de guerre aux Noirs", a-t-il ajouté en brandissant son tee-shirt "Je suis Michael Brown".

Le propriétaire d'un magasin d'armes situé à une trentaine de kilomètres de cette banlieue de Saint Louis a affirmé que les ventes d'armes avaient explosé à l'approche de la décision.