De tous les pillards qui ont mis à sac les villes britanniques, ceux qui ont échappé à la justice avaient une chose en commun: le chandail à capuchon, dit hoody - le fameux kangourou. Ce vêtement a une connotation criminelle depuis déjà une décennie en Grande-Bretagne. Preuve de la criminalisation des jeunes pour les uns, symptôme d'un malaise social pour les autres, le débat sur le hoody fait rage.

Les policiers auront bientôt le pouvoir de démasquer en tout temps les jeunes cagoulés, parole de David Cameron. Mais ce n'est pas suffisant pour Nuri Parlak, propriétaire d'un dépanneur à Tottenham, ce quartier de Londres où les pillages ont débuté samedi dernier.

«On devrait forcer les jeunes à enlever leur capuchon. Ils seraient plus identifiables en cas de vol», dit le commerçant, accompagné de Lola, un molosse aux énormes crocs.

Les policiers ont peur des jeunes encapuchonnés, soutient l'homme de 41 ans. «C'est pour ça qu'ils les ont laissés voler les magasins, samedi dernier», dit-il, sourire en coin.

Le kangourou est devenu le symbole par excellence des émeutes. Il revient sans cesse dans les vidéos qui ont atterré les Britanniques cette semaine.

Le phénomène des hoodies ne date cependant pas d'hier. Popularisée par la culture rap, la capuche est devenue synonyme de criminalité au début des années 2000. Les membres des gangs de rue s'en servaient pour se fondre dans la foule. Les jeunes des quartiers défavorisés l'ont adoptée pour se donner une image de dur à cuire.

Des tabloïds comme le Daily Express ont fait campagne pour faire interdire le «déguisement des sauvages». En 2005, des centres commerciaux et des écoles ont interdit le kangourou avec la bénédiction de l'ancien premier ministre Tony Blair.

Changement de registre

David Cameron avait pourtant manifesté, en 2006, une bouffée de compassion pour le hoody, vocable qui désigne tant le vêtement que le jeune qui le porte.

«La capuche est la réponse à un problème, pas le problème en soi, avait-il déclaré alors qu'il était chef de l'opposition. Nous la percevons comme l'uniforme d'une armée rebelle de jeunes gangsters. Mais pour les jeunes, c'est une façon d'être invisible dans un environnement dangereux.»

Le premier ministre a changé de registre, cette semaine: «Si vous êtes assez vieux pour commettre ces crimes, vous êtes assez vieux pour être punis», a-t-il lancé aux délinquants.

Chose certaine, les hoodies représentent plus que jamais une menace aux yeux des Britanniques. Et le refus de David Cameron d'engager un véritable débat sur les causes des émeutes ne fera que renforcer leur marginalisation, a écrit mercredi Seumas Milne, chroniqueur vedette du Guardian.