La recherche de survivants à la suite du passage de la tornade meurtrière en banlieue d'Oklahoma City était pratiquement terminée hier soir. Le bilan des morts a été revu à la baisse, passant de 51 à 24, dont 9 enfants. Selon le président des États-Unis Barack Obama, il s'agit « d'une des tornades les plus destructrices de l'histoire ». Notre journaliste s'est rendu au coeur de la dévastation.

Le premier signe que quelque chose n'allait pas est apparu sur l'écran de son téléphone posé près de sa cuisse gauche.

Gina dormait, lundi après-midi, quand son téléphone s'est mis à sonner.

Elle a répondu et a entendu la voix de sa soeur.

«La tornade s'en vient! Sauve-toi de la maison avec maman!», a-t-elle entendu, alors que le téléphone se mettait à sonner et à vibrer en rafale à cause des messages textes qui arrivaient.

Une fois réveillée, Gina (qui a demandé à La Presse de taire son nom de famille) a compris pourquoi tout le monde paniquait: la sirène d'alerte aux tornades résonnait dans son quartier.

«Je dormais tellement profondément que je n'ai rien entendu», a-t-elle dit, hier.

Au moment où elle s'est levée, un autre son a couvert celui de la sirène. Le bruit sourd d'une locomotive qui arrive.

Gina est sortie dans le couloir et est arrivée nez à nez avec sa mère âgée de 73 ans. Elles ont ouvert la porte d'un placard et se sont jetées par terre. Gina s'est couchée sur sa mère la protéger avec son corps.

Les deux femmes sont restées immobiles pendant qu'autour d'elles, la maison disparaissait dans un vacarme indescriptible.

«Je n'ai jamais eu aussi peur de ma vie. Le son était tellement fort, je m'attendais à être écrasée à tout moment par une poutre, ou autre chose.»

Au bout de «cinq à six minutes», la tornade a diminué d'intensité. Puis le silence est arrivé.

«Des voisins sont venus nous tirer des décombres. Toute la maison était détruite. Il ne restait que le placard où nous étions et un bout de la chambre à coucher», dit-elle.

Sa fille fréquente l'école primaire Briarwood, qui a été détruite dans la tornade. Elle n'a pas été blessée.

«C'est un miracle qu'on soit toutes encore en vie», dit-elle.

Hier, Gina et sa mère faisaient la queue près d'une roulotte FEMA du gouvernement fédéral dans un stationnement de la ville de Moore, près des quartiers décimés la veille par la tornade de catégorie EF5, le maximum sur l'échelle des classements.

Non loin de là, des milliers de bouts de carton, d'isolant, de tôle et de tissu recouvraient le sol comme des cendres projetées par un volcan en éruption. Un paysage d'épouvante s'élevait au sud de la 4e Rue, là où se trouvait l'école primaire Plaza Towers, complètement détruite, où sept élèves ont perdu la vie. Des montagnes de détritus, de bois et de matériaux tordus luisaient à cause de la pluie fine qui s'est abattue sur la région. Des arbres sans écorce et sans feuilles ajoutaient à l'aspect irréel de la scène.

Des agents du FBI et des policiers locaux empêchaient systématiquement les voitures et les piétons d'entrer dans les quartiers détruits ou touchés par la tornade. Les autorités ont signalé que des structures pouvaient s'écrouler, et aussi que les recherches pour retrouver les disparus se poursuivaient.

Derrière le volant de son pickup, Todd Stewart s'est entretenu durant plusieurs minutes avec un policier qui lui bloquait l'accès. M. Stewart a finalement fait demi-tour.

«Nous ne savons même pas si notre maison est encore debout, et ils ne nous laissent pas entrer», a-t-il dit à La Presse, visiblement remué.

À l'église baptiste de Moore, dans la 27e Rue, des douzaines de bénévoles distribuaient de l'eau, des couches et de la nourriture aux sinistrés.

Chris Johnson, 24 ans, et sa femme Sheila Johnson, 21 ans, patientaient avec leur nouveau-né âgé de 4 mois, Chris Johnson Jr.

Quand la sirène a retenti, lundi après-midi, le couple s'est d'abord placé dans la baignoire de sa maison de Moore, avec son bébé.

Puis des appels incessants des amis et de la famille ont convaincu M. Johnson de fuir avec sa femme et son fils.

«Tout le monde partait dans mon quartier, a-t-il dit. Nous avons pris des couches de rechange et nos cellulaires. Sur l'autoroute, j'ai roulé à 115, 125 km/h. On pouvait voir la tornade qui approchait. J'ai fini par la semer.»

M. Johnson ne peut pas retourner chez lui pour le moment, mais s'attend à retrouver sa maison endommagée. Il dit vouloir continuer à habiter à Moore.

«J'ai vécu toute ma vie ici, et les tornades ont toujours été une menace. Il faut apprendre à vivre avec cette menace.»

Le dernier bilan de la tornade qui a touché la communauté de Moore lundi faisait état de 24 morts, dont 9 enfants.

Le pays des tornades meurtrières

Les États-Unis et les tornades font la paire. Depuis toujours, les Américains sont habitués à ces tempêtes parfois meurtrières. Ils ont construit des abris, ont mis en place des techniques d'urgence. Malgré tout, le bilan demeure souvent dramatique. Depuis 1950, plus de 6000 personnes sont mortes à cause d'une tornade. C'est sans compter les milliers de blessés. Voici le bilan de 10 tornades meurtrières.

Source: Storm Predictor Center

- Hugo Pilon-Larose