La présidente sud-coréenne destituée Park Geun-Hye était claquemurée samedi dans le palais présidentiel tandis que des dizaines de milliers de manifestants réclamaient à Séoul son arrestation, d'autres protestant contre son limogeage.

Au lendemain d'une décision de la Cour constitutionnelle confirmant la destitution de Mme Park qu'avait votée le 9 décembre 2016 l'Assemblée nationale, un troisième manifestant, âgé de 74 ans selon l'agence Yonhap, est décédé samedi à l'hôpital. Il avait perdu conscience la veille lors d'échauffourées entre la police antiémeute et des partisans de Mme Park dans lesquelles deux autres manifestants avaient été tués.

L'ex-présidente n'a fait aucun commentaire depuis la décision de la Cour, prise à l'unanimité vendredi par ses huit juges.

Des milliers de policiers antiémeutes étaient déployés à Séoul alors qu'environ 50 000 manifestants opposés à Mme Park célébraient le verdict en scandant : « le peuple a gagné ! Arrêtez Park ! »

De leur côté, environ 20 000 partisans de Mme Park en colère s'étaient regroupés pour réclamer un réexamen de la décision de la Cour. La police avait installé des barrières pour séparer les manifestations opposées.

Le président de la Commission électorale nationale Kim Yong-Deok a fait part d'une « inquiétude croissante » face à cette tension avant l'élection d'un nouveau président, qui devrait se tenir sous 60 jours. Les médias évoquent la date du 9 mai.

« Le scrutin doit fournir l'occasion de dépasser les divisions et les conflits et d'aboutir à l'unité nationale et l'harmonie », a-t-il déclaré dans un discours télévisé en direct.

La police a averti samedi qu'elle poursuivrait les fauteurs de troubles. La veille, elle avait procédé à plusieurs arrestations parmi les manifestants pro-Park.

Le Parti démocratique, principale formation de l'opposition, a appelé la présidente à accepter la décision prise unanimement par les huit juges de la Cour et l'a accusée de se comporter comme si elle la refusait.

Le propre parti de Mme Park, Liberté Corée, avait présenté vendredi ses excuses, son président par intérim estimant avoir « échoué à protéger la dignité et la fierté de la Corée du Sud ».

Seule dans sa chambre

Selon les médias sud-coréens, Mme Park a regardé en direct à la télévision, seule dans sa chambre, la Cour annoncer sa décision.

Incrédule, elle a immédiatement téléphoné à ses conseillers pour avoir confirmation, selon le quotidien Chosun Ilbo. Selon ces conseillers, cités par le quotidien, elle n'a pas de projet immédiat pour publier un communiqué à propos de la décision de la Cour ou de ses propres intentions.

« La présidente semblait étonnée de la décision. Elle avait l'air abattue », a confié l'un de ces conseillers qui n'était pas identifié par le journal, ajoutant : « elle souhaite demeurer seule un moment ».

Mme Park doit quitter la Maison bleue, la présidence sud-coréenne où elle est cloîtrée depuis le vote de l'Assemblée nationale qui l'avait destituée le 9 décembre 2016. Mais elle attend que sa résidence privée soit prête, avait indiqué vendredi un porte-parole.

La confirmation de sa destitution la prive de tous ses pouvoirs et privilèges, sauf en matière de sécurité. La perte de son immunité l'expose à d'éventuelles poursuites judiciaires.

Des images télévisées ont montré des équipements en train d'être déchargés depuis un petit camion garé devant cette résidence, une maison à deux étages dans un quartier huppé du sud de la capitale. Deux cents policiers sont déployés aux alentours, selon la police.

La Cour a estimé que Mme Park avait enfreint la loi en permettant à sa confidente secrète, Choi Soon-Sil, de se mêler des affaires de l'État et qu'elle avait contrevenu aux règles de la fonction publique. Mme Choi est elle-même jugée pour avoir soutiré des millions de dollars à de grands groupes industriels.

Ce scandale à tiroirs empoisonne depuis des mois le pays, alors même que la Corée du Nord multiplie les tirs de missiles et les menaces, suscitant l'inquiétude de la communauté internationale.

Si Mme Park s'est excusée à de multiples reprises, elle a démenti toute malversation.

Mme Park, 65 ans, fille du dictateur militaire Park Chung-Hee, était devenue en 2012 la première femme à présider son pays. Elle devient le premier chef de l'État de Corée du Sud à être limogé de la sorte.

Après le vote des députés en décembre, des millions de Sud-Coréens étaient descendus dans la rue pour réclamer son départ.