La réclusion à perpétuité a été confirmée vendredi en appel pour Bo Xilai, l'ex-membre du Bureau politique du Parti communiste chinois (PCC) condamné le mois dernier pour corruption et abus de pouvoir.

«La cour populaire supérieure du Shandong (la province où Bo Xilai était jugé), au matin du 25 octobre, a rejeté l'appel et maintenu le verdict de prison à vie dans l'affaire de corruption, détournement de fonds et abus de pouvoir de Bo Xilai», a annoncé Chine Nouvelle sur son compte Weibo, l'équivalent chinois de Twitter.

La confirmation de la condamnation à la prison à vie de Bo Xilai - une sentence décidée au plus haut niveau du Parti communiste, auquel la justice chinoise est soumise - scelle le sort du plus haut dirigeant chinois traduit en justice depuis des années, à l'origine d'un scandale qui a ébranlé le régime.

Des centaines de policiers étaient postés tous les trois mètres et gardaient vendredi les entrées du tribunal de Jinan, où la presse étrangère n'avait pas été autorisée à pénétrer. Seuls quelques organes de la presse officielle ont eu accès au prétoire.

Les commerçants des alentours avaient été priés de fermer boutique pour l'occasion et la circulation interdite aux abords du tribunal.

Un convoi de véhicules aux vitres teintées avait été vu peu avant 10H00 (22h00, heure de Montréal) pénétrant dans l'enceinte du tribunal, laissant supposer que Bo Xilai avait été amené dans le prétoire pour l'occasion. Des responsables chinois avaient assuré récemment en privé à la presse étrangère qu'il assisterait à la lecture du verdict.

Bo Xilai avait été condamné le 22 septembre pour corruption, détournement de fonds et abus de pouvoir, notamment dans l'affaire de l'assassinat par son épouse Gu Kailai de l'homme d'affaires britannique Neil Heywood, qu'il est accusé d'avoir voulu étouffer.

Ambitieux et charismatique, un temps perçu comme un rival de l'actuel président Xi Jinping, l'ancien ministre du Commerce avait pris la tête en 2007 de l'immense métropole de Chongqing (sud-ouest) dont il est parvenu à faire un pôle économique majeur.

Il s'était singularisé en y orchestrant une campagne de réhabilitation des valeurs maoïstes les plus «rétro», parallèlement à une répression violente sous prétexte de lutte contre les «mafias». Une campagne qui s'est soldée par près de 5000 emprisonnements, dont beaucoup d'entrepreneurs privés.

Il avait été reconnu coupable d'avoir touché pour 20,4 millions de yuans (environ 3,6 millions $ CAN) de pots-de-vin. Tous ses biens ont été confisqués, notamment la villa de Cannes, sur la Côte d'Azur française, acquise illégalement, selon le verdict, grâce à Neil Heywood et à l'architecte et homme d'affaires français Patrick Devillers.

Véritable coup de théâtre, sa chute l'an dernier avait été provoquée par la défection de son bras droit, le chef de la police de Chongqing, Wang Lijun. Brouillé avec son patron, ce «superpolicier» avait demandé, en vain, l'asile politique au consulat américain de Chengdu, la capitale du Sichuan.

Il avait alors révélé, entre autres, que l'homme d'affaires britannique avait été assassiné par l'épouse de Bo Xilai, Gu Kailai. Cette brillante avocate, qui aurait agi pour des motifs financiers et pour «protéger» le fils du couple, a été condamnée l'an dernier à la perpétuité.

En acceptant son recours en appel début octobre, le régime, qui n'avait pas connu pareil scandale politico-judiciaire depuis la fin de la révolution culturelle (1966-76), a voulu se prémunir des critiques sur le caractère politique de ce procès, dont le déroulement houleux en première instance avait été salué comme «exemplaire» par la presse officielle chinoise.

Bo y avait fait preuve d'une rare pugnacité durant les cinq jours d'audience au mois d'août, contredisant les éléments avancés par le procureur, confrontant avec vigueur les témoins à charge, qualifiant de «folle» son épouse Gu Kailai et de «vil personnage» Wang Lijun, avant de traiter de «chien fou» un homme d'affaires accusé de multiples largesses au profit du clan Bo.

À Qinsheng, la prison qui l'attend au nord de Pékin, réservée à l'élite communiste «fautive», Bo Xilai recevra un traitement digne d'un hôtel de luxe, même s'il y sera placé sous la constante surveillance des agents du régime.

Bo Xilai est le plus haut dirigeant chinois envoyé en prison depuis la condamnation en 1998 de l'ex-maire de Pékin, Chen Xitong, et celle du maire de Shanghai, Chen Liangyu, en 2008, tous deux pour corruption.