Pékin a semblé présenter le rameau d'olivier, mercredi devant l'Asie du Sud-Est réunie en sommet, en jurant d'oeuvrer pour la paix en mer de Chine méridionale, objet de vifs différends maritimes avec ses voisins.

«Nous devons travailler de concert afin de faire de la mer de Chine méridionale une mer de paix, d'amitié et de coopération», a affirmé le premier ministre chinois Li Keqiang en marge du sommet annuel de l'Asean (Association des nations d'Asie du Sud-Est) au Brunei.

La Chine veut «assurer la liberté de navigation» dans la zone, a-t-il affirmé, menant une véritable offensive de charme auprès de l'Asean, à la faveur de l'absence de Barack Obama.

Le président américain, qui a dû annuler une importante tournée régionale en raison de la crise budgétaire chez lui, est considéré par nombre de pays de la région comme le seul à même de contrecarrer les prétentions chinoises.

«Notre partenariat avec l'Asean reste une priorité de l'administration Obama», a assuré le secrétaire d'État John Kerry qui a reçu la lourde tâche de remplacer le président, tentant d'apaiser les petits pays de l'Asean, en particulier le Vietnam et les Philippines, en butte aux ambitions territoriales chinoises.

Pékin revendique quasiment toute la mer de Chine méridionale, carrefour de routes maritimes vitales pour le commerce mondial, et réserve potentielle d'hydrocarbures.

Afin d'apaiser les dissensions, l'Asean tente depuis dix ans de convaincre Pékin de signer un code de bonne conduite en mer de Chine méridionale, censé prévenir la détérioration des conflits territoriaux.

La Chine avait jusqu'à présent préféré les négociations bilatérales où, selon ses détracteurs, elle peut bénéficier à plein de tout son poids de géant asiatique.

Mais Pékin semble avoir quelque peu évolué récemment, se disant plus «ouvert» sur la question. Mi-septembre, la Chine avait ainsi promis des discussions «progressives» avec l'Asean sur le sujet.

Un groupe de travail commun avait alors été établi, chargé de mener «des consultations concrètes» sur ce projet de code.

Lors d'un discours historique la semaine dernière devant le Parlement indonésien, le président chinois Xi Jinping avait de plus promis une résolution «pacifique» du conflit en mer de Chine méridionale.

Mercredi au Brunei, M. Li a abondé dans la même voie, affirmant que Pékin était «disposé à travailler avec d'autres pays... à la formulation d'un code de conduite».

Il reste à voir si ces paroles seront suivies d'effet, mais même le président philippin Benigno Aquino, pourtant l'un des plus fervents opposants aux prétentions territoriales de Pékin, a souligné «un certain progrès» dans les négociations sur le code de conduite.

«Tout le monde s'implique dorénavant, même la Chine», a-t-il souligné.

Des experts y voyaient plutôt une tactique de Pékin visant à gagner du temps, afin de renforcer son arsenal militaire.

«La Chine ne va pas faire de compromis sur ses prétentions» territoriales, a estimé Ian Storey, de l'Institut de Singapour pour les études sur l'Asie du Sud-Est.

Quand le sommet des dix de l'Asean s'élargira jeudi à l'Asie de l'Est plus les USA, un autre différend viendra s'ajouter: celui opposant Pékin à Tokyo en mer de Chine orientale cette fois, où la Chine revendique un petit archipel désert administré par le Japon sous le nom de Senkaku (Diaoyu pour Pékin).

Le président Xi a échangé une poignée de main furtive avec le premier ministre japonais Shinzo Abe au sommet de l'Asie-Pacifique à Bali. Et au Brunei, aucun entretien bilatéral n'est programmé entre MM. Li et Abe.

Le sommet de l'Asean doit également être l'occasion de faire progresser l'idée d'un marché commun de l'Asie du Sud-Est, qui regrouperait 600 millions d'habitants. L'ambition est de l'atteindre en 2015, mais beaucoup doutent que cela soit possible.

«Avec deux ans devant nous, nous faisons encore face à des défis dans la mise en oeuvre de notre feuille de route», a reconnu de manière diplomatique le sultan du Brunei, Hassanal Bolkiah, hôte du sommet.