Les élections partielles birmanes d'avril, essentielles pour tester la sincérité des réformes du nouveau régime, sont reportées dans l'extrême nord du pays en proie à des combats entre l'armée et des rebelles d'une minorité ethnique, ont annoncé vendredi les médias d'État.

Des combats violents, qui ont forcé des dizaines de milliers de civils à fuir, ont repris en juin entre les militaires birmans et l'Armée pour l'indépendance kachine (KIA) dans l'État Kachin, à la frontière avec la Chine.

«Pour des raisons de sécurité, les conditions pour tenir des élections libres et justes ne sont pas réunies», a précisé la télévision d'État, sans donner de nouvelle date.

Le report concerne trois circonscriptions de cet État, qui devaient toutes les trois pourvoir des sièges vacants à la chambre basse du Parlement. Au total, 45 sièges devront donc désormais être pourvus lors de ce scrutin, dont 37 à la chambre basse.

La Ligue nationale pour la démocratie (LND) de l'opposante Aung San Suu Kyi s'est montrée déçue de cette décision.

«Les élections sont importantes pour le système que nous construisons. Je regrette vraiment qu'elles n'aient pas lieu dans l'État Kachin», a déclaré son porte-parole Nyan Win à l'AFP.

«Le gouvernement a donné la sécurité comme raison. Je ne sais pas si c'est vrai», a-t-il ajouté, soulignant qu'il était allé dans une de ces circonscriptions récemment et qu'il n'y avait «pas de problèmes de sécurité».

Les élections partielles du 1er avril, auxquelles participera pour la première fois Suu Kyi, pèsent lourd dans le processus de réformes engagées par le nouveau gouvernement qui a succédé à la junte en mars 2011.

Depuis un an, cette nouvelle équipe dirigée par d'anciens militaires a notamment encouragé le retour de Suu Kyi au coeur du jeu politique.

Elle a également entamé des négociations avec les groupes rebelles de minorités ethniques, dont certains n'ont jamais pacifié leurs relations avec le pouvoir central depuis l'indépendance en 1948.

Le gouvernement a même signé des cessez-le-feu avec plusieurs d'entre eux, mais les discussions avec les rebelles kachins n'ont pas donné de résultat.

«Des combats se poursuivent dans certaines zones de l'État Kachin presque tous les jours», a assuré vendredi à l'AFP Yup Zaw Hkaung, important homme d'affaires kachin qui sert de médiateur entre le gouvernement et la branche politique de la KIA.

«Il n'y a pas eu d'amélioration depuis que les deux parties se sont rencontrées début mars».

Malgré des inquiétudes concernant la sécurité, Suu Kyi avait visité deux des trois circonscriptions concernées le mois dernier dans le cadre de sa campagne.

L'annonce du report intervient alors que les appels se multiplient pour attirer l'attention sur le sort des déplacés.

Dans un rapport publié mardi, l'organisation de défense des droits de l'homme Human Rights Watch a accusé les troupes birmanes de se livrer à de multiples exactions contre les civils.

Selon HRW, 45 000 personnes se sont réfugiées dans des zones sous contrôle kachin, environ 10 000 ont traversé la frontière avec la Chine et 20 000 sont parties en zone gouvernementale.

La responsable des opérations humanitaires des Nations unies Valerie Amos a assuré vendredi que l'ONU «travaillait très dur» pour obtenir un accès aux déplacés, précisant que le gouvernement avait jusqu'ici autorisé un seul convoi de l'ONU, en décembre.