Le gouvernement thaïlandais et les manifestants ont assuré samedi qu'ils tiendraient le cap des négociations en cours pour sortir de la crise, malgré une nouvelle éruption de violences qui a coûté la vie à deux policiers et fait douze blessés à Bangkok.

Deux mois de manifestations émaillées de heurts et d'attaques portent désormais à 29 le bilan des morts alors qu'un millier de personnes ont été blessées dans la plus grave crise qu'ait connue le royaume depuis 1992.

Des attaques commises à l'aide de trois grenades M-79 ont eu lieu tôt samedi contre un poste de contrôle des forces de l'ordre à proximité du campement des protestataires au coeur de la capitale, selon la police.

Un policier de 35 ans est décédé à l'hôpital tandis que huit autres personnes (cinq policiers et trois militaires) ont été blessées.

Un peu plus tôt, un homme avait ouvert le feu dans le quartier d'affaires de Silom, tuant un autre policier et blessant quatre personnes (deux policiers et deux civils).

Malgré le fossé qui les sépare, les deux camps, toujours prompts à s'accuser de tous les maux, sont convenus que ces attaques visaient à faire avorter la fragile feuille de route pour la réconciliation présentée par le Premeir ministre Abhisit Vejjajiva.

«Certains groupes de gens ne veulent pas que ce plan soit couronné de succès, le gouvernement demande donc aux "chemises rouges" de prendre une décision, sinon il y aura d'autres victimes», a déclaré le porte-parole du gouvernement, Panitan Wattanayagorn.

«La meilleure solution, c'est que les manifestations prennent fin au plus vite pour faire avancer le processus de réconciliation», a-t-il ajouté.

Les «chemises rouges», dont beaucoup se revendiquent de l'ex-Premier ministre en exil Thaksin Shinawatra, ont réuni jusqu'à 100 000 manifestants à Bangkok mi-mars avant de dresser des barricades de bambous acérés et de pneus imprégnés de liquides inflammables autour d'un vaste quartier.

Les «rouges», qui exigent le départ d'Abhisit et des élections anticipées, viennent initialement des zones rurales du nord et du nord-est mais ont depuis rallié à leur cause une partie des masses populaires des environs de Bangkok.

Un de leurs leaders a estimé samedi que les attaques étaient le fait «de gens qui ne veulent pas que cette crise se règle de façon pacifique». «Cela ne détournera pas notre attention et ne fera pas dérailler le processus», a assuré Nattawut Saikuar.

Les ambassadeurs des pays de l'Union européenne à Bangkok ont condamné les violences et appelé à un règlement pacifique de la crise.

«Nous condamnons fermement les récentes violences et exprimons nos condoléances aux familles des victimes», écrivent les diplomates dans un communiqué publié samedi.

«Nous appelons l'ensemble des acteurs à éviter toute violence et espérons qu'une solution pacifique pourra être rapidement trouvée pour ramener la Thaïlande sur la voie de la réconciliation nationale, de la prospérité et de la stabilité», déclarent-ils.

La nouvelle éruption de violences survient alors que semblait se profiler une sortie de crise.

Une feuille de route pour la réconciliation, proposée par Abhisit et comprenant des législatives anticipées le 14 novembre, avait reçu mardi un accueil positif des «chemises rouges».

Le Premier ministre avait promis jeudi de dissoudre la chambre basse du Parlement dans la deuxième quinzaine de septembre, ouvrant la voie à des élections anticipées dans l'espoir de vaincre la méfiance de manifestants.

Les parties tentent toujours de surmonter leurs divergences sur la date de la dissolution du parlement, avant la tenue du scrutin législatif.

Compliquant encore un peu plus la situation, les ennemis jurés des «rouges», les «chemises jaunes» royalistes théoriquement favorables à Abhisit, ont dénoncé sa faiblesse et exigé qu'il annule les élections anticipées.

Un autre groupe, également favorable à l'actuel gouvernement et surnommé les «multicolores», a demandé que la date des élections soit repoussée.