L'opposante birmane Aung San Suu Kyi refuse l'enregistrement de son parti, la Ligue nationale pour la démocratie (LND), avant les élections promises par la junte cette année car elle considère les récentes lois électorales «injustes», a indiqué mardi son avocat.

La junte s'est attirée les foudres de la communauté internationale en promulguant début mars des lois qui préparent les premières élections législatives depuis 20 ans, et qui obligent notamment le parti à exclure la dissidente de ses instances.

La junte du généralissime Than Shwe a en effet interdit aux détenus d'appartenir à un parti, une mesure qui oblige la LND à exclure Mme Suu Kyi, puisqu'elle purge actuellement une peine de 18 mois de résidence surveillée.

À défaut d'obéir à cette loi, le premier parti de l'opposition serait dissous.

Mme Suu Kyi «dit qu'elle n'acceptera jamais l'enregistrement (du parti) sous des lois injustes», a indiqué Nyan Win, avocat et porte-parole de la LND.

«Mais son attitude personnelle n'est pas de donner des ordres ou des instructions à la LND. Elle a demandé à la LND de décider démocratiquement», a-t-il ajouté, laissant entendre que la décision finale devrait dépendre du vote des membres du Comité central exécutif du parti.

La LND avait indiqué récemment qu'elle déciderait formellement le 29 mars de participer ou non aux élections. La date du scrutin n'a pas encore été annoncée, mais il doit se tenir cette année.

Début mars, la junte birmane avait nommé les 17 membres de la commission électorale, sans faire mystère de sa volonté de contrôler entièrement le processus. Elle a aussi publié une loi qui annule les élections de 1990, remportées brillamment par la LND mais que les militaires n'avaient jamais accepté de reconnaître.

L'ensemble de ces textes avaient provoqué une indignation générale au sein de la communauté internationale, qui a dénoncé l'absence de crédibilité du processus électoral.

Mais la situation soulève d'importantes questions pour la LND, sa survie politique et son avenir.

«La LND doit décider si elle s'adapte à une situation profondément injuste et essaye de participer, ou si elle garde ses principes intacts et continue d'être exclue» du jeu politique, a relevé David Mathieson, pour l'organisation Human Rights Watch (HRW).

L'analyste a confirmé les rumeurs de débats intenses, sur ce dossier, au sein du parti de la prix Nobel de la paix.

«Je ne crois pas que nous saurons ce qu'ils vont faire avant qu'ils ne le décident eux mêmes», a ajouté David Mathieson. Cette situation «peut unir le parti, provoquer sa scission ou le forcer à se réorganiser».

Win Min, analyste birman et militant pro-démocratie, a quant à lui estimé que le parti devrait probablement respecter la position de sa figure de proue.

«Ce serait difficile pour les membres de la LND d'aller contre son opinion. Mais certains d'entre eux pourraient vouloir participer (...), peut-être en créant un autre parti, avec une autre stratégie», a-t-il estimé.