Un étrange silence flottait sur Urumqi où patrouillaient des forces de sécurité nombreuses lundi, au lendemain des émeutes au bilan très lourd de 140 morts et tandis que les habitants se terraient et les commerces restaient fermés.

«Mon magasin est fermé, on nous a demandé de fermer pour trois jours», a déclaré à l'AFP un commerçant de l'ethnie mulsulmane hui près du bazar d'Urumqi, au lendemain des émeutes les plus violentes en plusieurs décennies en Chine.

Des milliers de Ouïghours ont attaqué des Hans, l'ethnie majoritaire en Chine, avec des couteaux, des bâtons, ou à coups de pied, ont indiqué des habitants, faisant au moins 140 morts, selon un bilan officiel, qui «risque de s'alourdir», a souligné Chine Nouvelle.

Mais des dissidents ouïghours ont affirmé que les forces de police --qui étaient rapidement intervenues dimanche soir pour rétablir l'ordre-- avaient tiré sur des manifestants qui protestaient de manière pacifique.

Des centaines d'émeutiers ont également été arrêtés dans cette région aux confins de l'Asie centrale où la politique de sinisation est souvent très mal perçue par la communauté musulmane, qui est en revanche accusée par Pékin d'accueillir des terroristes en son sein.

«Les gens restent à l'intérieur. Le mieux pour vous est de rester à votre hôtel, c'est le plus sûr», ajoute le commerçant hui.

Tout le quartier du bazar était étrangement calme et silencieux, tandis que les voitures particulières se faisaient rares dans les rues où des véhicules de la police et de la sécurité étaient en revanche nombreux.

Jusqu'à 2000 policiers anti-émeute en uniformes kaki, casqués, armés de matraques et portant des boucliers faisaient des rondes dans les rues, tandis qu'aux intersections, des hommes des forces paramilitaires armés de fusils-mitrailleurs faisaient le guet.

Des camions transportant des bergers allemands remontaient et descendaient les grandes avenues.

Une mare de sang séché d'un mètre était visible près du marché de Donghuan, à l'est du bazar, et des briques tachées de sang étaient encore par terre.

Des Ouïghours ont indiqué que des émeutiers avaient attaqué des Hans avec des machettes.

Près du marché Donghuan, des carcasses d'autobus et de voitures calcinés jonchaient les rues, tandis que des ouvriers étaient en train de réparer des barricades défoncées.

La plupart des commerces du quartier étaient fermés lundi, et quelques rares passants arpentaient les rues, hommes coiffés du petit chapeau musulman et femmes portant le voile.

Des propriétaires chinois de magasins nettoyaient leurs commerces aux vitres brisées par les émeutiers et dont beaucoup avaient été pillés.

Les violences ont éclaté après que la police a commencé à arrêter des Ouïghours protestant contre la mort de deux membres de leur communauté lors d'une bagarre dans une usine de jouets de Canton (sud de la Chine) la semaine dernière.

Mais de nombreux Ouïghours interrogés lundi ont refusé de parler davantage des violences de la veille par peur de représailles.