Deux personnalités de l'opposition birmane, le très populaire comédien Zaganar et un journaliste sportif, arrêtés après avoir distribué de l'aide aux rescapés du cyclone Nargis, ont été condamnés vendredi à 45 ans et 15 ans de prison, selon l'entourage de Zaganar.

Les deux hommes avaient été arrêtés en juin, avec deux autres opposants à la junte militaire, pour avoir, selon les autorités, tenté de fomenter des désordres en distribuant des secours aux victimes du cyclone, qui a fait 138.000 morts ou disparus en mai en Birmanie.

Les autorités militaires birmanes n'avaient cependant pas donné les raisons exactes de ces arrestations.

Zaganar «a été condamné à 45 ans de prison pour trois chefs d'accusation. Il doit encore être jugé pour quatre autres chefs», a déclaré vendredi à l'AFP la soeur de l'acteur, Ma Nyein, qui n'a pas été autorisée à assister à l'annonce du verdict.

Celui-ci a été prononcé dans la prison d'Insein, au nord de Rangoun, où sont détenus la plupart des opposants au régime militaire.

«Je suis fière de mon frère. Il a fait ce qui était bien pour le peuple», a-t-elle ajouté.

Le journaliste sportif Zaw Thet Htwe a été condamné à 15 ans de prison, selon la même source, et les deux autres opposants à 29 et 15 ans de prison.

Après le passage de Nargis, qui a dévasté le sud de la Birmanie et fait 2,4 millions de sinistrés, le régime a été accusé d'avoir filtré et ralenti l'aide internationale, au risque d'accroître le nombre des victimes.

L'avocate du comédien, Khin Htay Kywe, a indiqué à l'AFP qu'elle avait l'intention de faire appel du verdict.

Elle a ajouté qu'un moine qui avait organisé des manifestations contre le régime en août 2007 avait été condamné à 68 ans de prison, la peine la plus lourde prononcée jusqu'à présent.

L'armée est au pouvoir depuis 1962 en Birmanie et exerce des contrôles très stricts sur la population. Elle n'a pas hésité dans le passé à étouffer tout mouvement de protestation.

En septembre 2007, des moines bouddhistes avaient été le fer de lance d'un puissant mouvement de protestation contre la vie chère qui, au bout d'une semaine, avait été violemment réprimé par le régime militaire.

Plus de cent opposants ont été emprisonnés par les tribunaux militaires depuis un mois. Le 11 novembre, 23 étudiants --dont plusieurs femmes-- ont été condamnés à des peines de 65 ans de prison pour leur participation à ces manifestations.

Au moins 31 personnes avaient été tuées et 74 portées disparues, selon un enquêteur des Nations unies, dans la répression des manifestations.

Vendredi, la Ligue nationale pour la démocratie (LND), dirigée par l'opposante Aung San Suu Kyi, a appelé la junte à revenir sur les peines prononcées à l'encontre des manifestants.

Ces peines «non seulement accroissent les difficultés au lieu de résoudre la situation politique de la Birmanie (...), mais empêchent aussi les nouvelles générations d'avoir un rôle moteur dans l'avenir politique» du pays, a écrit la LND dans un communiqué.

Zaganar, âgé d'une quarantaine d'années, avait été arrêté le 4 juin dans son appartement de Rangoun. Il a déjà été emprisonné au moins quatre fois pour ses activités politiques, notamment en septembre 2007 pour avoir apporté son soutien aux manifestations menées par les moines bouddhistes.

Zaw Thet Htwe, 42 ans, avait été arrêté le 13 juin à Minbu, dans le centre de la Birmanie. Il avait par le passé été condamné à mort pour trahison, puis libéré après avoir purgé 18 mois de prison, cette sentence ayant été commuée en peine de prison.