(Dacca) Le Bangladesh a condamné 139 responsables et militants d’opposition au cours des dernières 48 heures, ont annoncé lundi des procureurs et des avocats, alors que la répression contre l’opposition s’intensifie à l’approche des élections.

De nombreux militants du Parti nationaliste du Bangladesh (BNP), principal parti d’opposition, ont été reconnus coupables de violences lors des manifestations, d’incendie criminel et d’entrave au fonctionnement de la police, avec des condamnations allant de quelques mois à trois ans et demi.

Le BNP a rejeté ces condamnations, les jugeant « dénuées de fondement et politiquement motivées ».

Le Bangladesh va tenir des élections générales le 7 janvier, un scrutin que les partis d’opposition menacent de boycotter de crainte qu’il ne soit truqué.

La première ministre Sheikh Hasina vise un quatrième mandat consécutif au pouvoir, malgré les inquiétudes exprimées par les États-Unis et d’autres pays sur la tenue d’élections libres et équitables.

Le BNP, qui a par le passé dénoncé des élections truquées, a organisé depuis l’année dernière des manifestations massives pour réclamer la démission de Mme Hasina ainsi que l’organisation d’élections par un gouvernement neutre.

Mais depuis fin octobre, la police a réprimé l’opposition, arrêtant la quasi-totalité des hauts dirigeants du BNP ainsi que des milliers de ses militants et partisans.

Au moins 132 militants et hauts responsables du BNP ont été incarcérés dimanche et lundi par deux tribunaux d’instance de Dacca, la capitale du pays, ont indiqué deux procureurs à l’AFP.

« Grèves et blocus »

« Le juge Md (Mohammed) Ataullah a condamné lundi 70 militants et dirigeants du BNP dans quatre affaires différentes », a déclaré à l’AFP le procureur Shahid Uddin.

« Ils ont été reconnus coupables d’incendie criminel et d’entrave au travail de la police », a-t-il dit, ajoutant que parmi les condamnés figuraient l’influent chef de la jeunesse du BNP, le sultan Salahuddin Tuku, ainsi que deux anciens chefs de la branche étudiante et un chef de district.

« Ces cas datent de 2013 à 2018, lorsque l’opposition a imposé des grèves et des blocus », a ajouté le procureur. « Ils ont été condamnés à des peines de prison allant de six mois à deux ans ».

En outre, le juge Mohammad Sheikh Sadi a condamné 62 autres militants du BNP à trois ans et demi de prison chacun dans le cadre d’une affaire datant de 2018, a déclaré à l’AFP le procureur général de Dacca, Abdullah Abu.

Sept autres militants du BNP ont également été emprisonnés par le juge Sadi, a déclaré à l’AFP l’avocat Nazrul Islam. Parmi eux figure Saiful Alam Nirob, un ancien chef de la jeunesse du BNP qui, selon le journal américain New York Times, faisait face à plus de 300 procès.

« Aucun témoin n’a dit quoi que ce soit contre mon client Nirob », a déclaré son avocat, Me Islam. « Pourtant, il a été reconnu coupable et condamné. Je crains qu’aucun tribunal sur Terre n’ait entendu cette affaire, et encore moins rendu un jugement ».

Les procureurs et les avocats ont déclaré que la plupart des accusés n’étaient pas présents au tribunal au moment de la sentence.  

« Nous ne pouvons même pas défendre correctement nos clients […] nous ne savions même pas qu’il y aurait un verdict aujourd’hui », a ajouté Me Islam.

« Anéantir le BNP »

Le responsable juridique du BNP, Kayser Kamal, a accusé les tribunaux d’agir comme un outil politique au service de la première ministre.  

« Les procès ont été menés sur la base de considérations politiques. Ces affaires visaient uniquement les dirigeants de l’opposition ayant participé aux élections législatives dans le passé et qui pourront contester le vote à l’avenir », a déclaré M. Kamal à l’AFP.  

« L’idée, selon lui, est d’anéantir le BNP et d’emprisonner tous les dirigeants et militants de l’opposition du pays ».

Le 28 octobre, la police a dispersé un grand rassemblement d’opposition à Dacca après le meurtre d’un officier, le BNP affirmant que 13 personnes avaient été tuées dans la répression.  

Le BNP affirme également qu’au moins 13 210 de ses dirigeants et militants ont été arrêtés depuis.