(Bangkok) Le parti réformiste vainqueur des dernières élections en Thaïlande a annoncé vendredi qu’il se rangerait la semaine prochaine derrière le candidat d’une autre formation au sein du bloc pro-démocratie, après le rejet par le Parlement de son propre chef pour le poste de premier ministre.

Nommés par l’armée, les sénateurs ont rejeté par deux fois la candidature de Pita Limjaroenrat, chef de file de Move Forward (MFP), qui dispose du plus grand nombre de députés mais dont le programme a été jugé trop radical et hostile à la toute-puissante monarchie.

Le parti soutiendra donc le candidat du Pheu Thai (PT), arrivé en deuxième position et déjà associé à Move Forward au sein d’une coalition de huit partis. Le parti a annoncé que son candidat serait désigné mercredi, la veille du vote au parlement.

Le MFP est arrivé largement en tête lors du scrutin du 14 mai grâce au soutien massif d’une jeunesse avide de changements profonds dans le royaume gouverné par les militaires depuis quasiment une décennie.

Maintenant, « le plus important n’est pas que Pita devienne premier ministre, mais que la Thaïlande puisse devenir un pays démocratique », a déclaré vendredi le secrétaire général du MFP, Chaitawat Tulathon devant les journalistes.

Le Pheu Thai est un poids-lourd de la politique thaïlandaise, dirigé en sous-main par la famille Shinawatra, qui compte parmi ses membres deux anciens premiers ministres évincés par des coups d’État militaires en 2006 et 2014.

« Lors du prochain vote (jeudi) pour désigner le premier ministre, le MFP votera pour le candidat du PT, tout comme ce dernier a voté pour le candidat du MFP », a déclaré Chaitawat.  

Les élites conservatrices du royaume s’opposent fermement au programme réformiste de Move Forward, qui veut notamment adoucir la stricte loi de lèse-majesté, qui protège le roi et sa famille de toute critique.

PHOTO WASON WANICHAKORN, ASSOCIATED PRESS

Le MFP est arrivé largement en tête lors du scrutin du 14 mai grâce au soutien massif d’une jeunesse avide de changements profonds dans le royaume gouverné par les militaires depuis quasiment une décennie.

Mercredi, Pita a été suspendu de son mandat de député par la Cour constitutionnelle, saisie sur des soupçons d’irrégularités pendant sa campagne. Il a dû quitter l’hémicycle en pleine session réunie pour statuer sur sa deuxième candidature après un premier rejet la semaine dernière.

Le vote n’a finalement pas eu lieu, sa candidature ayant été jugée contraire au règlement de l’Assemblée.

L’homme d’affaires au profil consensuel Srettha Thavisin (60 ans), l’une des deux principales figures du PT, semble en meilleure position pour être le candidat du bloc pro-démocratie au poste de premier ministre.  

Le Pheu Thai a déclaré vendredi qu’il consulterait d’autres partis de la coalition sur la manière d’obtenir davantage de soutien auprès des sénateurs, y compris sur la question épineuse de la lèse-majesté.

In fine, la présence de Move Forward parmi les soutiens de Srettha pourrait encore une fois conduire au refus des sénateurs et ainsi le pousser à s’allier avec des mouvements plus conciliants avec l’armée.

Le premier ministre sortant, le général Prayut Chan-o-cha qui assure l’intérim, a appelé au calme jeudi après le rejet définitif de la candidature de Pita qui a fait resurgir le spectre de manifestations massives comme en 2020 après la dissolution du parti Future Forward, ancêtre de Move Forward.