(Séoul) Le Conseil de sécurité de l’ONU n’a pas réussi à parler d’une seule voix vendredi à l’issue de sa réunion en urgence suscitée par le dernier tir de missile hypersonique de la Corée du Nord, au lendemain d’un nouvel essai de Pyongyang.

« La France voulait une déclaration à la presse mais la Russie et la Chine ont dit que ce n’était pas le moment, qu’il y avait besoin de temps pour analyser la situation », a confié sous couvert d’anonymat à l’AFP un diplomate d’un pays membre du Conseil.

La réunion, d’un peu plus d’une heure et à huis clos, avait été demandée par les États-Unis – une initiative rare depuis 2017 –, la France et le Royaume-Uni. Son objectif était d’examiner le tir de missile en début de semaine par Pyongyang, présenté comme « hypersonique » par les Nord-Coréens. Depuis, la Corée du Nord a annoncé avoir testé jeudi avec succès un missile antiaérien « récemment développé ».

Dans son projet de texte, Paris voulait affirmer « la préoccupation » du Conseil face aux activités nord-coréennes et « appeler à appliquer pleinement les sanctions », a précisé une source diplomatique.

La majorité du Conseil, incluant les États-Unis, ont soutenu le projet de déclaration « mais la Russie et la Chine ont indiqué qu’il n’était pas pertinent à ce stade », selon la même source.  

PHOTO KCNA, VIA REUTERS

Le leader nord-coréen Kim Jong-un

La Corée du Nord a depuis longtemps eu recours à des essais d’armement pour faire monter les tensions, dans le cadre d’un processus soigneusement étudié.

« Tester la température »

Avec ses dernières actions, Kim Jong-un cherche à « tester la température avec Washington » et ses « limites » en matière de provocations, a déclaré à l’AFP Soo Kim du groupe de réflexion américain RAND Corporation.

« Il souhaite peut-être voir jusqu’où il peut aller jusqu’à ce que l’administration Biden commence à flancher », a-t-elle ajouté.

En 2017, à l’initiative de l’administration de Donald Trump, le Conseil de sécurité avait adopté des sanctions économiques lourdes contre la Corée du Nord après un essai nucléaire et des tests de missiles.

Depuis l’entrée en fonction de l’administration de Joe Biden, il est revenu à la France, un peu isolée, de monter en première ligne pour réclamer une réunion à huis clos du Conseil de sécurité lorsque Pyongyang procédait à un essai de missile.

Le 27 octobre, peu après le tir du missile présenté comme hypersonique par la Corée du Nord, l’ambassadeur nord-coréen à l’ONU, Kim Song, avait affirmé devant l’Assemblée générale annuelle des Nations unies, que son pays avait un « droit légitime » à tester des armes et à « renforcer [ses] capacités de défense ».  

Mais pour le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken, au contraire, la Corée du Nord favorise « l’instabilité et l’insécurité ».  

« Nous sommes inquiets de ces violations répétées des résolutions du Conseil de sécurité [de l’ONU] qui favorisent l’instabilité et l’insécurité », a dit le secrétaire d’État à des journalistes en marge de discussions à Pittsburgh.  

Bomber le torse

Le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un a rejeté plus tôt jeudi l’offre de dialogue des États-Unis, accusant le président Joe Biden de poursuivre les « actes hostiles » de ses prédécesseurs, ce qu’a aussitôt nié Washington.

Avec ce nouveau tir jeudi, Pyongyang cherche à bomber le torse et à « exister sur la scène internationale », analyse le chercheur Ahn Chan-il, ancien transfuge nord-coréen.

Le président sud-coréen Moon Jae-in a récemment réitéré ses appels à une déclaration formelle de la fin de la guerre de Corée – les hostilités ont cessé en 1953 avec un simple armistice plutôt qu’un traité de paix formel.  

Avec ses tirs répétés, Pyongyang cherche à « gagner du temps et essaye de tirer le meilleur parti possible à la fois de la proposition de Séoul de déclarer la fin de la guerre et de l’offre de Washington de parler sans conditions préalables », assure Ahn Chan-il.

L’administration Biden a déclaré à plusieurs reprises qu’elle était prête à reprendre les pourparlers sans conditions préalables, alors que la Corée du Nord réclame la fin des sanctions radicales.