(Hong Kong) La méfiance des Hongkongais à l’égard des vaccins contre la COVID-19 fait que les autorités locales pourraient devoir prochainement jeter des doses périmées, au moment où ces fioles sont l’objet, ailleurs dans le monde, de toutes les convoitises.

L’ex-colonie britannique est un des rares endroits au monde à avoir réussi à se procurer suffisamment de doses pour vacciner l’ensemble de sa population, soit 7,5 millions d’habitants. Mais pour plusieurs raisons, la campagne de vaccination y est loin du succès espéré.  

Il y a d’abord la méfiance profonde des Hongkongais vis-à-vis de leurs gouvernants, perçus comme le bras de la répression chinoise, deux ans après l’immense mobilisation populaire de 2019.

En cause également, la désinformation et le sentiment relativement répandu qu’il n’y a aucune urgence à se faire vacciner, en raison de la faible circulation du virus à Hong Kong et faute de mesures incitatives. Les dispositions drastiques de quarantaine ont en outre enlevé aux Hongkongais toute envie de voyager.

Mardi, un haut fonctionnaire les a avertis qu’ils n’avaient plus qu’une « fenêtre de trois mois » avant que le premier lot de vaccins Pfizer-BioNTech ne soit périmé.

« Le monde lutte »

Les vaccins « ne peuvent être utilisés après la date de péremption et les centres de vaccination de quartier administrant le BioNTech cesseront de fonctionner après septembre, selon le calendrier actuel », a déclaré à la radio publique RTHK Thomas Tsang, un ancien contrôleur du Centre pour la protection sanitaire.

« Le monde entier lutte pour trouver des vaccins », a-t-il rappelé en estimant « injuste » que Hong Kong n’utilise pas ses doses.

Lundi, six dirigeants de pays d’Amérique latine et des Caraïbes ont réclamé à la communauté internationale un accès équitable aux vaccins.

« Nous lançons un appel ardent aux pays qui disposent d’un surplus de doses ou qui ont déjà vacciné leur population à risque, pour qu’ils mettent en œuvre des mesures afin que ces excédents soient distribués équitablement et de manière immédiate », ont affirmé les dirigeants d’Argentine, du Mexique, de Jamaïque, de Bolivie, d’Équateur et d’Uruguay dans un communiqué diffusé par le président du Costa Rica, Carlos Alvarado.

Hong Kong a acheté 7,5 millions de doses du vaccin Pfizer-BioNTech et autant du Sinovac (Chine), bien que non encore approuvé par l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

Hong Kong avait aussi précommandé 7,5 millions de doses du vaccin AstraZeneca avant de se raviser, expliquant qu’elle projetait plutôt d’utiliser ce budget pour les vaccins de seconde génération.

A ce stade, 19 % de la population a reçu une première dose et 14 % la seconde.

Pas d’incitation financière

Les hésitations se retrouvent même au sein des personnels de santé. Il y a quelques semaines, l’autorité hospitalière a révélé qu’un tiers seulement de son personnel, pourtant prioritaire, s’était fait vacciner.

Au total, Hong Kong a reçu près de 3 263 000 millions de doses du Pfizer-BioNTech. Mais seules 1,2 million ont été administrées.

« Ce que nous avons est probablement tout ce que nous aurons cette année », a encore prévenu M. Tsang.

Quelque deux millions de doses de Sinovac ont été livrées, mais leur durée de conservation est plus longue (un an).

Ces dernières semaines, des responsables politiques hongkongais ont avancé que l’ex-colonie devrait envisager d’expédier ses doses non utilisées à l’étranger si davantage de Hongkongais ne demandent pas à se faire vacciner.

Les autorités ont globalement laissé aux entreprises le soin de convaincre leurs employés d’aller se faire vacciner.

Au début de l’année, le gouvernement avait annoncé 5000 HKD (560 euros) d’aides aux particuliers sous la forme de coupons à dépenser, afin de doper l’économie.

Certains avaient suggéré que l’on subordonne la remise de ces coupons au fait d’être vacciné ou que l’on incite les gens à recevoir les doses en leur donnant d’autres aides en liquide.

La cheffe de l’exécutif Carrie Lam a balayé mardi cette idée. « Proposer du liquide ou quelque chose de tangible pour inciter les gens à se faire vacciner ne devrait pas être fait par le gouvernement », a-t-elle dit. « Cela pourrait même avoir l’effet opposé à celui qui est recherché. »