(Bichkek) Le président du Kirghizstan Sooronbaï Jeenbekov a refusé à nouveau mercredi de démissionner avant de nouvelles élections dans ce pays d’Asie centrale, où son autorité est contestée depuis le début d’une crise politique post-électorale.

Le dirigeant kirghiz a indiqué qu’il démissionnerait « après le retour de la légalité dans le pays, des élections parlementaires et l’annonce d’élections présidentielles », a affirmé à l’AFP sa porte-parole, Tolgonaï Stamalïeva.  

M. Jeenbekov a également souligné « qu’il n’a pas le droit de quitter la présidence car cela pourrait conduire à des conséquences imprévisibles au détriment de l’État », a ajouté Mme Stamalïeva.  

Cette déclaration intervient après des discussions avec le premier ministre nouvellement élu, Sadyr Japarov, qui a demandé le départ immédiat de Soroonbaï Jeenbekov, selon la présidence kirghize.

La nomination du nationaliste Sadyr Japarov, désigné premier ministre la semaine dernière mais contesté, a été validée mercredi par le Parlement, puis le président Jeenbekov avec l’espoir de mettre fin à la crise.

Sadyr Japarov purgeait jusqu’en début de semaine dernière une longue peine de prison pour avoir participé à la prise d’otage d’un gouverneur régional. Il a été libéré par ses partisans et a profité du chaos politique dans le pays pour tenter à plusieurs reprises d’obtenir le poste de premier ministre.

Au pouvoir depuis 2017, Sooronbaï Jeenbekov avait jusqu’alors refusé de valider sa nomination à moins que le parlement ne la confirme avec la majorité de voix requise par la loi et en présence de plus de la moitié des députés, ce qui a été fait mercredi.

Le dirigeant kirghiz a en conséquence signé un décret validant la nomination de Sadyr Japarov et de son cabinet, a indiqué la présidence dans un communiqué.

La crise politique au Kirghizstan a commencé après des élections législatives début octobre, remportées par deux partis pro-présidentiel mais entachées d’accusations de fraude.

Ont suivi plusieurs jours de chaos et des violentes manifestations qui ont fait un mort et plus d’un millier de blessés tandis que le président Jeenbekov semblait avoir perdu le contrôle du pays et avait même promis de démissionner.

Mais sa position a été renforcée mardi après la visite de Dmitri Kozak, chef-adjoint de l’administration présidentielle de la Russie, qui s’est entretenu avec MM. Japarov et Jeenbekov.

Les deux hommes sont des adversaires politiques et M. Japarov appelait jusqu’à présent au départ du président. Le parlement a d’ailleurs nommé mardi comme président un proche allié de M. Jeenbekov, Kanat Issaïev, suggérant qu’un compromis a été atteint.

Mercredi, quelque 500 partisans de M. Japarov ont néanmoins manifesté contre l’élection de M. Issaïev à Bichkek, la capitale, selon un journaliste de l’AFP, réclamant qu’un allié de M. Japarov soit nommé à sa place.

Le Kirghizstan, la plus pluraliste mais aussi la plus instable des ex-républiques d’Asie centrale, a déjà connu deux révolutions et vu trois de ses présidents emprisonnés ou exilés depuis son indépendance.

Si Sadyr Japarov est devenu un acteur clé de ces troubles, l’ex-président Almazbek Atambaïev et grand rival de l’actuel chef d’État a lui été renvoyé en prison où il purge une peine de onze ans pour avoir fait libérer un chef mafieux. Au début de la crise, il avait été brièvement libéré par ses partisans.