(Shenzhen) Le procès des militants prodémocratie hongkongais arrêtés en août alors qu’ils tentaient de fuir Hong Kong en hors-bord a débuté lundi en Chine, les États-Unis appelant à leur libération immédiate et dénonçant une « tyrannie ».

Six mois après l’adoption d’une loi draconienne sur la sécurité nationale à Hong Kong, l’audience est emblématique de la reprise en main par Pékin de l’ex-colonie britannique, devenue territoire semi-autonome chinois.

Le verdict sera annoncé ultérieurement, a indiqué le tribunal chinois qui jugeait lundi 10 des 12 membres de ce groupe, accusés de passage illégal de frontière.

« Leur seul crime est d’avoir fui la tyrannie », a déclaré un porte-parole de l’ambassade des États-Unis à Pékin. « La Chine communiste ne s’arrête devant rien pour empêcher ses ressortissants d’aller trouver la liberté ailleurs ».

Les 12 hommes, dont le plus jeune était âgé de 16 ans, avaient été arrêtés par les gardes-côtes chinois à 70 km du territoire autonome le 23 août, avant d’être remis à la police de Shenzhen (sud), métropole chinoise aux portes de Hong Kong.

Ils tentaient de se rendre à Taïwan, île rivale de la Chine continentale.

« Le tribunal a entendu les réquisitoires du Parquet, les remarques des différents accusés et les plaidoyers des avocats. Le verdict sera annoncé à une date ultérieure », a indiqué lundi le tribunal du district de Yantian à Shenzhen.

Parmi les personnes autorisées à assister au procès figuraient notamment des journalistes et des « parents » des prévenus, souligne le communiqué.

Les reporters étrangers étaient toutefois empêchés d’accéder au tribunal, a constaté l’AFP. Et le comité de soutien des accusés a démenti lundi devant la presse à Hong Kong la présence des familles, qui ne pouvaient assister à l’audience.

« Profondément préoccupé »

Plusieurs proches se sont plaints de n’avoir pas pu avoir de véritable contact avec les avocats de la défense imposés par les autorités chinoises.

« Cette procédure judiciaire inique est la preuve qu’il s’agit d’une persécution politique », a dénoncé le comité de soutien dans un communiqué.

Une dizaine de diplomates de plusieurs pays (Allemagne, Canada, États-Unis, France, Pays-Bas, Portugal, Royaume-Uni) ont également été empêchés d’entrer dans le tribunal.

Selon leurs familles, trois des accusés disposent de la nationalité britannique, portugaise et vietnamienne.

PHOTO PETER PARKS, AGENCE FRANCE-PRESSE

Les familles d'activistes accusés se sont adressés à la presse le visage couvert, lundi à Hong Kong.

Un porte-parole de la diplomatie chinoise a fait part lundi de sa « ferme opposition » aux propos de l’ambassade des États-Unis, exhortant Washington à « arrêter toute ingérence » dans ses affaires intérieures.

« Les lois doivent être respectées et les contrevenants poursuivis », a-t-il souligné.

Dix prévenus ont été jugés lundi. Les deux autres, mineurs au moment des faits, doivent être jugés séparément à une date non précisée.

Deux des 12 accusés sont accusés d’avoir organisé la fuite de l’ensemble du groupe. Ils risquent une peine plus lourde allant jusqu’à sept ans de prison.

Les opposants avaient disparu dans l’opaque système judiciaire chinois depuis leur arrestation.

Le ministre britannique des Affaires étrangères Dominic Raab a indiqué lundi dans un communiqué que Londres, ex-puissance coloniale à Hong Kong, était « profondément préoccupé » par le fait que les militants hongkongais « ont été jugés au secret ».

« Nous attendons de la Chine qu’elle fasse respecter l’État de droit et mène les procès de manière équitable et transparente. »

Loi controversée

Certains des passagers du hors-bord étaient déjà menacés de poursuites à Hong Kong pour leur implication dans les immenses manifestations prodémocratie, souvent violentes, ayant secoué la ville l’an dernier.

La contestation a été étouffée début 2020 par l’épidémie de COVID-19, qui a entraîné la fin des manifestations, puis par l’imposition fin juin dans le territoire d’une nouvelle loi rigoureuse sur la « sécurité nationale ».

Pékin la juge indispensable pour restaurer la stabilité à Hong Kong. Ses détracteurs estiment qu’elle a mis fin aux libertés du territoire, garanties lors de sa rétrocession à la Chine par le Royaume-Uni en 1997.

Seules les familles étaient autorisées à demander au juge la permission d’assister au procès. Mais pour cause d’épidémie, les habitants de Hong Kong ne peuvent entrer actuellement en Chine continentale.

Lundi également, la « journaliste citoyenne » Zhang Zhan, arrêtée après avoir couvert en début d’année la mise en quarantaine de la ville de Wuhan (centre), berceau du nouveau coronavirus, a été condamnée à Shanghai (est) à quatre ans de prison.

La Chine a pour habitude de condamner des opposants lors des fêtes de fin d’année, lorsque l’attention du reste du monde est réduite.